Pour un salaire minimum européen.
Par Guy Van Sinoy le Vendredi, 29 Février 2008 PDF Imprimer Envoyer
Une revendication du Parti de la Gauche Européenne PGE. Du 11 au 13 janvier dernier, le Bureau exécutif du Parti de la Gauche Européenne (PGE) s’est réuni à Berlin. Le PGE est un regroupement, sur le plan européen, de partis à gauche de la social-démocratie. Il compte dans ses rangs 19 partis politiques originaires de 17 pays, soit au total un peu plus de 180.000 membres. Parmi les organisations membres du PGE, quatre d’entre elles ont un poids numérique important (de 30 à 40.000 membres) : Die Linke, Rifondazione Comunista, le Parti Communiste Français et Synaspismos (Coalition de la Gauche, des Mouvements et de l’Ecologie – Grèce). Le Parti Communiste de Bohème et de Moravie compte quelque 9.000 membres, tandis que le Bloc de gauche portugais, Izquierda Unida et le Parti Communiste d’Espagne ont chacun de 5 à 7.000 membres. Les autres formations sont plus petites.

Il ne faut cependant pas confondre le PGE avec le groupe de la Gauche Unifiée Européenne/ Gauche Verte Nordique (GUE/NGL) au parlement européen, qui est une fraction parlementaire de partis de gauche au parlement européen. La GUE/NGL regroupe 41 députés européens originaires de 17 partis politiques dans 13 pays d’Europe. Ces 41 députés élus en juin 2004 représentent presque 9 millions d’électeurs.

Réformiste ou anticapitaliste?

Pour être membre du PGE, il ne faut pas nécessairement avoir d’élu au parlement européen. Mais la différence entre PGE et GUE/NGL ne se limite pas seulement à cet aspect technique. Les sensibilités politiques entre les deux regroupement n’y sont pas rigoureusement identiques. Si Die Linke, Rifondazione Comunista, Synaspismos, Izquierda Unida, le PCF sont à la fois membres du PGE et de la GUE/NGL, il n’en est pas de même pour d’autres formations. Ainsi, le Bloc de Gauche portugais, membres à part entière du PGE, a un statut de membre associé à la GUE/NGL. Inversement, le Parti Communiste de Bohème et de Moravie, le Parti Progressiste des Travailleurs (Chypre) et le Partido dei Comunisti Italiani sont observateurs au PGE et membres à part entière de la GUE/NGL. Plus important encore : ni le Parti Communiste Portugais, ni le KKE (Parti Communiste Grec), ni le Socialistische Partij (Pays-Bas) ne sont ni membres ni observateurs du PGE !

Pas de Kominform bis

La conversion des partis sociaux-démocrates aux recettes néo-libérales a laissé un espace politique à gauche en Europe et chacun tente de combler ce vide comme il le peut. La fondation du Parti de la Gauche Européenne, au congrès de Rome en juin 2004, a donc correspondu à la volonté de rassembler, au-delà des aléas du scrutin européen, des partis de gauche qui refusent les dérives néo-libérales. Le PGE n’est certes pas un bloc homogène, mais les principaux partis qui le constituent (Die Linke, Rifondazione Communista, Synaspismos, le PCF, Izquierda Unida) peuvent être caractérisés aujourd’hui comme des partis de la gauche réformiste. Ce n’est pas pour autant qu’avec la fondation du Parti de la Gauche Européenne, on ait assisté à la création d’un « Kominform bis ». Echaudés par l’expérience du stalinisme, les responsables du PGE veillent scrupuleusement au respect de l’indépendance des partis membres et ne souhaitent vraiment pas revenir aux méthodes de l’époque ou le Kremlin était le « parrain » des partis communistes, à l’Est comme à l’Ouest. Lors de la réunion de Berlin de janvier 2008, un certain nombre de sessions ont été consacrées à la discussion de points chauds de l’actualité politique mondiale : la campagne pour les élections présidentielles aux Etats-Unis, la situation de guerre civile larvée au Kenya, le sommet d’Annapolis et le blocus de Gaza. La situation au Kosovo a été particulièrement débattue, d’autant plus que plusieurs partis participants viennent de pays ou de régions où la question nationale est perçue de façon vive (Chypre, Catalogne, Grèce).

La motion sur le Kosovo a particulièrement mis l’accent sur le danger de violation unilatérale des frontières reconnues et a dénoncé les manœuvres de l’Union européenne qui pousse à l’indépendance du Kosovo. Curieusement, la question du droit des peuples à l’autodétermination n’a pas été évoquée. Une série d’autres motions ont été adoptées à la suite des débats (protestation contre les bombardements opérées par l’armée turque au Kurdistan, solidarité avec les dockers du Pirée victimes de la répression policière, pour le droit des femmes à l’avortement remboursé par la sécurité sociale). D’autres sessions du week-end du 11 au 13 janvier ont été consacrées au développement du PGE (bilan du 2e congrès du PGE tenu à Prague en novembre 2007, règles de fonctionnement de l’Exécutif, cotisations et budget de fonctionnement). Un planning d’activités, assez chargé pour l’année 2008, a été présenté. L’enjeu majeur pour le PGE, au-delà de la réussite des élections européennes de juin 2009, est de pouvoir s’élargir à d’autres formations politiques en Europe, y compris au-delà des forces rassemblées aujourd’hui dans la GUE/GNL.

Mais d’ici là, beaucoup de choses doivent encore avoir lieu, y compris en décembre 2008 un congrès du PCF qui peut être caractérisé « d’existentiel ». Les dernières heures ont été consacrées à un débat sur la situation sociale en Europe, avec la participation de Frank Bsirske, Président national du syndicat Ver.di (services publics). A la surprise des participants venus de Belgique, où on considère souvent que l’Allemagne reste malgré tout un pays avec de bons salaires, il n’existe pas de salaire minimum garanti en Allemagne ! Les salaires reposent uniquement sur le rapport de forces entre le monde du travail et le capital. La discussion s’est clôturée par une motion en faveur d’un salaire minimum à l’échelle européenne. La difficulté a toutefois été de formuler la revendication d’une manière concrète car les écarts moyens de salaires restent profonds.

Les bons résultats enregistrés par Die Linke, deux semaines plus tard, aux élections pour les parlement régionaux en Allemagne, ont assurément été accueillis avec enthousiasme par les responsables du PGE.

PGE: membres et observateurs

Le PGE regroupe, en tant que membres, les organisations suivantes : Die Linke (Allemagne), Rifondazione Comunista (Italie), le Parti Communiste Français, Synaspismos (Grèce), le Parti des Communistes de la République de Moldavie, le Bloc de Gauche (Portugal), Izquierda Unida (Espagne), le Parti Communiste d’Espagne, Esquerra Unida i Alternativa (Catalogne), le Parti du Travail de Suisse, Rifondazione Comunista (Saint-Marin), le Parti Communiste d’Autriche, le Parti Communiste (Belgique), Dei Lenk (Luxembourg), l’ODP (Turquie), le Parti de l’Alliance Socialiste (Roumanie), le Parti Hongrois des Travailleurs Communistes, le Parti Estonien de Gauche.

A titre d’observateurs : le Parti Communiste de Bohème et de Moravie (Tchéquie), le Partido dei Comunisti Italiani, Sinistra Europea (Italie), le DKP (Allemagne), l’Alliance Rouge Verte (Danemark), le Parti Communiste de Finlande, le Parti Progressiste des Travailleurs (Chypre), l’AKOA (Grèce), les Jeunes Socialistes (Pologne), Une Autre Gauche (Belgique).

GUE/NGL: membres et partis associés

La GUE/NGL regroupe, en tant que membres, les organisations suivantes : Die Linke (Allemagne), le Parti Communiste de Bohème et de Moravie (Tchéquie), Rifondazione Comunista (Italie), le KKE (Grèce), le Partido dei Comunisti Italiani, le Parti Communiste Français, Synaspismos (Grèce), le Parti Progressiste des Travailleurs (Chypre), le Parti Communiste Portugais, le Sinn Féin (Irlande), le Socialistische Partij (Pays-Bas), Izquierda Unida (Espagne), le Parti de la Gauche (Suède), le Rassemblement Démocratique de la Martinique.

A titre de partis associés : le SVP (Norvège), le Bloc de Gauche (Portugal), le Parti du Travail de Suisse, Dei Lenk (Luxembourg).

Hommage à Rosa et à Karl

Le 15 janvier 1919, un peu plus de deux mois après le commencement de la Révolution allemande, Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, dirigeants de la Ligue Spartacus (premier noyau politique de ce qui allai devenir le Parti Communiste Allemand) étaient assassinés par la soldatesque aux ordres des sociaux-démocrates. Chaque année, une commémoration a lieu le deuxième dimanche de janvier. Des dizaines de milliers de Berlinois viennent fleurir devant les tombes de Rosa et de Karl. Ce dimanche 13 janvier 2008, les participants à la réunion de l’Exécutif du Parti de la Gauche Européenne se sont mêlés à la foule pour rendre hommage à Rosa Luxembourg et à Karl Liebknecht. Lothar Bisky, président du PGE, a également fleuri une plaque commémorative eux victimes du stalinisme.

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