Défendre l’emploi, pas la bagnole
Par Jean-Louis Fauchet le Jeudi, 21 Décembre 2006 PDF Imprimer Envoyer

Il faut défendre l'emploi. Tous les emplois. Mais si le POS défend l'emploi des travailleurs de Volkswagen, il ne peut souscrire à la défense de l'industrie automobile comme telle.

Celle-ci, au demeurant, est d'ores et déjà condamnée comme pourvoyeuse massive d'emploi. L'assemblage des voitures se fait de manière de plus en plus automatisée, de manière telle qu'il faut de moins en moins d'heures de travail d'ouvrier pour produire une voiture. S'opposer à l'automatisation de la production n'est pas une solution, d'une part parce que nul ne soutiendra que le travail sur une chaîne de montage est un travail épanouissant, d'autre part parce qu'une usine qui n'améliorerait pas sa rentabilité serait rapidement réduite à la faillite par le jeu de la concurrence.

Insoutenable écologiquement

L'industrie automobile est condamnée à terme : l'usage généralisé de la voiture individuelle est insoutenable d'un point de vue écologique. La voiture est l'un des principaux responsables de la production de gaz à effet de serre, et donc du réchauffement climatique. Si tous les habitants de la planète se déplaçaient en voiture dans la même proportion que le font les " Occidentaux ", non seulement la situation deviendrait intenable d'un point de vue environnemental, mais en outre l'épuisement des ressources pétrolières s'accélérerait considérablement. Même en tablant sur un développement intensif des biocarburants ou d'autres sources d'énergie renouvelable et moins polluante, l'humanité ne pourrait faire face à la poursuite de l'extension de l'usage de l'automobile.

Par ailleurs, le succès même de l'automobile se retourne contre elle. L'encombrement du trafic en fait un moyen de déplacement ou de transport peu efficace, sans compter les nuisances sur le plan de la santé (au triple aspect du stress, de la pollution et des accidents), de la dégradation de la qualité de la vie urbaine, des pertes économiques dues aux arrivées en retard.

Réorganiser l'espace et les transports

Bien entendu, on aura toujours besoin d'une certaine quantité de voitures dans certains services publics. On peut aussi concevoir que des voitures soient mises à la disposition des particuliers, y compris pour un usage de loisir. Mais il n'est pas nécessaire que chacun dispose en permanence d'une voiture et effectue avec elle n'importe quel déplacement qui pourrait se faire bien mieux autrement.

Le nombre de voitures en circulation et le kilométrage parcouru par elles doivent impérativement diminuer. Ceci implique, bien entendu, le développement adéquat d'un réseau de transport public et l'adaptation de la voierie à d'autres modes de déplacement. Mais aussi la réorganisation de l'espace, de manière à limiter au maximum le " navettage " des travailleurs ou la course vers les grandes surfaces de la périphérie, par une décentralisation optimale de l'activité et une multiplication des commerces et services de proximité.

De telles mesures sont peu compatibles, naturellement, avec l'impératif de rentabilité propre au capital privé. A chacun de choisir ses valeurs, et de tirer les conclusions.

Restructuration

Pour en revenir à l'industrie automobile et à la défense de l'emploi de ses travailleurs, il est incontestable qu'une solution à long terme passe par la reconversion de l'activité. On pourrait, bien sûr, pour ce qui est de la Belgique, conserver une chaîne de montage et y produire, sur initiative publique après expropriation, un véhicule à la fois performant d'un point de vue écologique et efficient quant à la sécurité. Un tel véhicule ne serait pas plus cher, mais moins cher qu'un véhicule ordinaire si on intégrait dans le prix de ce dernier les coûts assumés actuellement par la collectivité en matière d'assurance maladie-invalidité et d'organisation de la sécurité routière, sans parler du coût d'une dépollution.

Mais le gros de l'industrie automobile devra être reconverti dans d'autres activités. Pourquoi pas, justement, la production des équipements et du matériel roulant devant équiper un réseau de transport collectif digne de ce nom ?

Voir ci-dessus