Israël: Le réel et le virtuel. L'extrême droite européenne accueillie avec les honneurs
Par Michel Warschawski, Olivier Goldsmith, David Cronin le Lundi, 20 Décembre 2010 PDF Imprimer Envoyer

(Photo: Raymond Saublains) La réalité, c’est d’abord une offensive sans précédent de la colonisation juive en Cisjordanie, en particulier à Jérusalem Est. Une colonisation qui se fait au grand jour et non en cachette, ce malgré les tentatives avortées de Barak Obama d’y mettre au moins un bémol. La réalité, c’est un gouvernement d’extrême droite dont le programme, l’idéologie et la stratégie sont l’élargissement des frontières de l’État d’Israël par la colonisation. La réalité, c’est un ministre israélien des Affaires étrangères – Avigdor Liberman - qui, à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies, se moque ouvertement de tous ceux qui parlent de processus de paix.

La réalité israélienne, c’est une longue série de lois votées ou sur le point de l’être par le parlement : l’une vise à criminaliser l’appel à des sanctions ou la saisie d’instances judiciaires internationales pour d’éventuels crimes de guerre, une autre lie naturalisation· et allégeance au caractère juif de l’État d’Israël, une autre encore envisage de défaire de sa nationalité (sic) une députée israélienne arabe pour avoir participé à la flottille, et la liste est encore longue.

Soulignons, en outre, le procès du militant palestinien de Haïfa, Ameer Makhbill, qui vient d’être condamné à sept ou dix ans de prison (le juge décidera prochainement de la peine exacte) pour avoir rencontré des militants proches du Hezbollah en Jordanie.

Le journaliste israélien Gideon Levy (1) écrivait récemment que l’adoption de ces lois transformait la nature du régime de démocratique en ethnocratique. Pour une fois, je suis en désaccord avec celui que je considère comme le meilleur éditorialiste israélien : l’État juif, comme il se définit lui-même, a toujours été une ethnocratie. Les changements constitutionnels enclenchés par le gouvernement d’extrême droite vont faire d’Israël un État fasciste où le citoyen doit faire allégeance à l’État.

La réalité israélienne, c’est la montée d’incidents racistes de plus en plus violents dans les villes mixtes avec le soutien des autorités locales, l’incitation des autorités religieuses et la passivité des forces de police. C’est l’expulsion en masse de réfugiés qui fuient la misère et la guerre, essayant de trouver un refuge et un emploi en Israël. La réalité israélienne, c’est une classe politique corrompue, un ancien chef de l’État - Moshe Katsav - en procès pour viol, un néo-libéralisme débridé à côté duquel la Grande-Bretagne de Margaret Thatcher a l’air d’un État socialiste, une société où un tiers des enfants vit sous le seuil de pauvreté et où les protections sociales, qui longtemps ont été parmi les meilleures du monde capitaliste, sont systématiquement démantelées. Finalement, la réalité d’Israël 2010, c’est une société « consensuelle » où les voix dissidentes sont noyées et où le mouvement de la paix, qui a longtemps été l’honneur d’Israël, n’est plus qu’un souvenir lointain. Une société dont le Parlement est divisé entre la droite extrême et l’extrême droite, et dont a disparu tout ce qui pouvait être caractérisé de modéré (à part les neuf députés élus par la minorité arabe).

Mais la réalité israélienne c’est aussi un grand aveuglement, une arrogante incapacité à voir les nuages qui s’accumulent à l’horizon et qui sont lourds de terribles tempêtes. Le monde qui nous entoure est en train de changer : la Turquie, autrefois alliée stratégique dans le cadre de l’Otan, prend ses distances, l’Iran devient une grande puissance régionale, et au Liban les États-Unis ne parviennent pas à imposer leur contre-réforme.

Autre cécité des dirigeants israéliens : l’entrée en force de nouveaux acteurs régionaux - la Russie, la Chine et l’Inde - qui mène à la fin de l’hégémonie totale des États-Unis et de l’alliance Washington-Tel Aviv dans la région.

D’ici une dizaine d’années, le Moyen-Orient n’aura plus rien à voir avec le fantasme néoconservateur de l’Empire américain. Les résistances cumulées au Liban, en Palestine, en Irak et en Afghanistan ont calmé les ambitions impériales de Washington. Elles vont, tôt ou tard, ramener l’État d’Israël à sa taille réelle et faire taire sa folie de la démesure.

Mais, apparemment, les médias et ce qu’on appelle la communauté internationale préfèrent le virtuel au réel, le rêve aux réalités. En ce sens, le cas palestinien est une mise en garde contre l’information de masse qui est devenue l’opium des peuples, un soporifique pour les citoyens. « Fermez la télévision, elle vous ment », disaient les manifestants de 1968. Plus de quatre décennies ont passé et leur appel garde toute sa pertinence.

Michel Warschawski

CQFD n° 83, novembre 2010 http://cequilfautdetruire.org/spip.php?article2332

(1). À lire : Gidéon Levy, Gaza, articles pour Haaretz, 2006-2009, La Fabrique, 2009. À lire aussi : l’interview de Gidéon Levy par notre camarade Najate Zouggari dans CQFD n° 75, février 2010. Ndlr.


L’extrême-droite européenne reçue avec les honneurs par Israël

Une délégation de près de trente-cinq parlementaires et responsables européens d’extrême-droite est actuellement en visite en Israël. Silence dans les rangs de la presse française ! "Israël comme l’Afrique du Sud de l’apartheid s’en va chercher le soutien de l’extrême-droite européenne : où la concrétisation d’une stratégie préparée de longue date

Celle-ci va des populistes de l’UDC aux fascistes suédois, tous partageant la même islamophobie, certains d’entre eux ayant même un passif nazi ou antisémite avéré. Les responsables de partis suivants sont sur les lieux : Geert Wilders, Filip Dewinter et Frank Creyelman (responsable de la commission des affaires étrangères, Parlement belge), Heinz-Christian Strache (successeur de Haïder), René Stadtkewitz (président du Parti de la Liberté wilderien, Allemagne), Kent Ekeroth (responsable du Parti des Démocrates Suédois), des Suisses et bien évidemment des Danois, dont l’extrême-droite est ouvertement atlantiste.

- Geert Wilders a été reçu par le ministre des Affaires Etrangères, le colon A.Lieberman.

- La délégation a été reçue à la Knesset en loge d’honneur, rencontrant divers parlementaires et ministres (Likoud, Shass)

- La délégation a été reçue par le maire d’Ashkelon, à l’occasion d’une conférence organisée à l’université locale (ville jumelée avec Aix) .

- La délégation a également été reçue par David Buskila, Maire de Sderot...et membre du parti travailliste ! (ville jumelée avec Antony) mais également par le kahaniste Moshe Feiglin, membre important du Likoud, avant une tournée en "Samarie".

La délégation se réclame d’une "European Freedom Alliance (EFA)" qui n’est autre que le nom de la branche européenne de l’American Freedom Alliance, une de ces officines néoconservatrices islamophobes financées par la lobbyiste milliardaire Aubrey Chernick. Cette dernière a signé une "Déclaration de Jérusalem", qui propose une alliance des démocraties contre "une nouvelle menace globale de type totalitaire : l’islamisme."

Plusieurs membres de la délégation actuellement en Palestine occupée (Paul Weston, Elisabeth Sabaditsch-Wolff....) sont annoncés comme intervenants des "Assises de l’Islamisation" prévues dans dix jours à l’Espace Charenton, à Paris. Assises organisées par Riposte Laïque et le Bloc Identitaire, avec l’appui du site néoconservateur drzz.fr (auquel collaborent Taguieff, Millière, Gurfinkiel).

Par ailleurs, l’avocat de Patrick Buisson, stratège de Nicolas Sarkozy, n’est autre que Gilles-William Goldnadel, qui fera paraitre bientôt ses "réflexions sur la question blanche".

Olivier Goldsmith

Sources :

http://www.rtlinfo.be/info/belgique/politique/758489/dewinter-recu-a-la-knesset-dans-le-cadre-d-une-tournee-anti-islam-en-israel

http://www.rnw.nl/english/bulletin/geert-wilders-meets-israeli-foreign-minister-lieberman

 CAPJPO-EuroPalestine

http://www.europalestine.com/spip.php?article5673


Un exemple d'aide de l'Union européenne à l'occupation de la Palestine

L'Union européenne se présente volontier comme un « médiateur » au Moyen Orient. En réalité, ses 27 gouvernements s'accomodent parfaitement bien de l'occupation des territoires palestiniens par Israël.

Un récent accord de « coopération plus intense, plus fructueuse, plus influente » entre l'UE et Israël hisse, sans qu'il n'ait le titre ce dernier pays au rang d'Etat membre de l'Union. Au lieu d'utiliser ces relations pour pousser Israël à la modération, l'UE légitime au contraire ses actions.

L'UE ne rend pas Israël responsable de ses crimes de guerre. L'enquête menée par une équipe désignée par l'ONU et dirigée par Richard Goldstone sur la conduite de la guerre d'Israël contre Gaza fut aussi exhaustive qu'il était possible de l'être dans les conditions présentes. Mais lors de la discussion de ce rapport de 572 pages devant l'Assemblée générale de l'ONU en novembre 2009, 22 des 27 pays membres de l'UE ont refusé de soutenir ce document.

Les compagnies d'armement israéliennes bénéficient du financement de l'UE. Comme Israël est le principal associé externe du « programme-cadre » de l'UE pour la recherche scientifique, l'Union est devenue la seconde source de subsides pour les recherches dans ce pays. Des fonctionnaires basés à Tel Aviv prédisent que la participation d'Israël à ce programme pluriannuel, entré en vigueur en 2007, atteindra les 500 millions d'euros d'aides à sa conclusion en 2013.

Parmi les bénficiaires de ces subsides figure Motorola Israël. Motorola participe à un projet de surveillance financé par l'UE et connu sous le nom de « iDetect4All », un système de senseurs capable de détecter des intrus dans des bâtiments ou des ressources de haute valeur économique.

Le concept « iDetect4All » est identique au système de radar que Motorala a installé dans 47 colonies israéliennes en Cisjordanie au cours de ces cinq dernières années. Le Jérusalem Post décrit le système comme une « clôture virtuelle » qui utilise des caméras thermiques pour identifier les personnes qui ne sont pas autorisées à entrer dans les colonies.

La machine de propagande bien huilée d'Israël a aidé à convaincre les responsables politiques de l'UE de voir ce pays comme une sorte de Canada méditerrannéen, un pays industrialisé « normal » ayant beaucoup de similitudes avec l'Europe. Mais Israël n'est pas un pays normal: il occupe illégalement la terre d'un autre peuple.

La relation sans cesse plus étroite entre l'UE et Israël ne peut être séparée du caractère brutal de l'occupation quotidienne imposée aux Palestiniens. Au plus cette relation s'approfondit, au plus l'Europe accepte et renforce l'oppression de la Palestine.

David Cronin

Auteur de « Europe’s Alliance with Israel – Aiding the Occupation. Pluto Press (2010) »

Source: http://patrickmacmanus.wordpress.com/ Traduction française pour le site www.lcr-lagauche.be

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