Dossier: Une présidence espagnole de l'UE sous le signe de la crise et du Traité de Lisbonne
Par J. Pastor, L. Daumas, R.M. Jennar le Lundi, 05 Avril 2010 PDF Imprimer Envoyer

La présidence espagnole de l'Union européenne pour ce premier semestre de 2010 se déroule dans un contexte particulièrement critique pour l'avenir de l'UE. Car c'est maintenant que l'on assiste aux conséquences du cocktail explosif entre, d'une part, les critères de convergence monétaristes fixés depuis le traité de Maastricht et le Pacte de Stabilité et de Croissance et, d'autre part, « l'effet dominos » de la crise financière et systémique née aux Etats-Unis.

De plus, le « tsunami » financier et social n'est pas terminé et secoue avec force non seulement les pays de l'ancien bloc de l'Est (où l'on assiste à la faillite de plusieurs Etat et à la chute de leurs gouvernements) mais également des pays comme la Grèce (qui est devenue une poudrière sociale depuis la fin 2008), l'Irlande, la Grande-Bretagne et l'Etat espagnol. Sans oublier des pays comme l'Islande, où a eu lieu un référendum populaire qui a rejeté les scandaleuses compensation que le gouvernement souhaitait accorder aux spéculateurs étrangers qui ont fait s'écrouler l'économie de l'île, et dont la plupart proviennent de l'UE.

Dans ce contexte, l'hétérogéineité des interêts entre les différentes bourgeoisies nationales au sein de l'UE explose et la mise en oeuvre de mesures communes devient de plus en plus difficile, comme on a pu le constater avec la marche arrière de Van Rompuy et de Zapatero suite à leur timides menaces de sanctions à l'égard des pays membres qui ne s'engageraient pas à revenir à une application stricte du Pacte de Stabilité et de Croissance (la dette et le déficit publics annuels ne devant pas dépasser, respectivement, 60% et 3% du PIB national).

Les contradictions entre le (et au sein du) «noyau moteur» de l'UE constitué par la France et l'Allemagne et l'Angleterre (par ailleurs fermement arrimée aux Etats-Unis et qui se maintien hors de l'euro) et d'autre part une « périphérie » constituée de pays qui font face à un endettement croissant et à un chômage de masse, rendent de plus en plus évident les risques pour l'avenir de la monnaie européenne, qui s'est maintenant affaiblie face au dollars.

Il n'est donc pas suprenant qu'aujourd'hui tous reconnaissent l'échec de la fameuse « Stratégie de Lisbonne », qui voulait transformer l'UE en « l'économie la plus compétitive du monde en 2010», et cela en dépit des dures attaques néolibérales qui ont été menées contre le classe ouvrière et les populations en générale ces dernières années pour parvenir à cet objectif.

Les rapports de forces géopolitiques et économiques entre l'UE et les vieilles et nouvelles grandes puissances continue à se déterorier pour la première. L'objectif prioritaire de l'UE sous présidence espagnole est de dégager un nouveau consensus pour tenter de freiner ce déclin au travers d'un nouveau tours de vis néolibéral et autoritaire. Le but, comme toujours, est la « croissance » économique et la restauration des taux de profits pour les capitalistes. Avec le danger de créer de nouvelles « bulles » spéculatives qui ne feront rien d'autre que de prolonger et d'aggraver le coma de l'économie réelle pour une longue période, à commencer pour des pays comme l'Etat espagnol.

Telle est l'orientation de la « Nouvelle stratégie pour la croissance et l'emploi 2020 » que prétendent imposer les élites européennes et ce n'est pas un hasard que la première réunion avec la « société civile » qu'à tenu Zapatero a été avec le lobby patronal européen de l'ERT (Table ronde des industriels), les mêmes qui, depuis 1985, donnent aux responsables politiques les directives à suivre pour la construction européenne.

Cette stratégie doit encore être concrétisée, mais elle impliquera plus que probablement de nouveaux pas en avant dans les politiques de libéralisation et de privatisation des services publics (cette année 2010 seront appliquées les mesures de libéralisation du réseau ferriviaire à longue distance et la marchandisation des universités avec le Plan Bologne); de gel salarial (y compris en renforçant l'inégalité salariale entre hommes et femmes) et la précarisation de l'emploi (avec l'extension des mesures de « flexicurité »), sans oublier la volonté de démanteler la sécurité sociale, de reculer l'âge de la pension, d'allonger le temps de travail en révisant à nouveau la directive actuellement en vigueur ou encore de renforcer l'Europe forteresse et autoritaire au nom de la lutte contre « l'immigration illégale » et la « lutte contre le terrorisme ».

A côté de cet agenda déjà bien chargé et malgré la déception exprimée par certains gouvernements européens devant l'échec du Sommet de Copenhague, l'aspiration des peuples en faveur de mesures efficaces qui luttent contre le changement climatique dans la justice sociale restera lettre morte, à la place, on agitera le leurre illusoire d'un « capitalisme » vert.

La concurrence entre les grandes puissances sur le plan économique et commercial se mène bien entendu au détriment des peuples du Sud de la planète, et tout particulièrement pour ceux d'Afrique, d'Amérique latine et des Caraïbes. Le Sommet européenne qui se tiendra avec le Maroc le 8 mars prochain à Grenade va nul doute confirmer le soutien apporté au régime dictatorial marocain et le conforter dans son rôle de gendarme régional des intérêts de l'UE en Afrique du Nord, écrasant au passage la lutte du peuple sarahoui pour son autodétermination et son indépendance.

Le Sommet du mois de mai avec les gouvernements d'Amérique latine et des Caraïbes serviront également à faire valoir aux peuples qui continuent à se révolter contre le néolibalisme et le putschisme qu'ils doivent respecter le « droit » à l'expropriation de leurs ressources par les multinationales capitalistes européennes et les oligarchies locales.

Sur le terrain géopolitique et militaire, la volonté des élites européennes reste ferme: il s'agit toujours de subordonner leur « politique de défense et de sécurité » aux intérêts de leur principal allié impérialiste que sont les Etats-Unis. Le Sommet des 24 et 25 mai avec le président Obama à Madrid aura une importance particulière puisqu'il s'agira d'y revaloriser la fonction de l'OTAN en tant que gendarme global d'un capitalisme en crise et de renforcer son rôle dans la guerre en Afghanistan-Pakistan pour le contrôle d'une zone géostratégique clé.

Il en est de même, évidement, avec le sommet Euro-Méditarranée des 6 et 7 juin à Barcelone, qui ne va certainement pas contribuer à rapprocher les deux rives les plus distantes du monde par leurs inégalités sociales. A ce sommet, on assistera très probablement à un concert de lamentations « humanitaires » vis à vis de la situation du peuple palestinien, tout en fortifiant le caractère de partenaire privilégié accordé par l'UE à l'Etat d'Israël magré le caractère terroriste de ce dernier.

Face à ce panorama, les campagnes qui se développent contre la présidence espagnole de l'UE doivent servir à mettre en lumière la nécessité d'une toute autre Europe et d'une sortie de crise par la gauche qui permette d'avancer vers une rupture ouverte non seulement avec le modèle actuel de croissance, mais aussi contre le capitalisme néolibéral qui le sous-tend.

Nous voulons une Europe qui garantisse le droit de travailler moins pour travailler tous et toutes; qui aspire à la socialisation des biens communs et du système bancaire; qui garantisse une autre répartition des richesses; qui lutte contre le changement climatique et pose les bases d'un autre modèle de civilisation; qui repose sur l'égalité pleine et entière pour toutes les femmes, notamment dans leur droit à décider de leur corps et de leurs choix sexuels; une Europe sans murs ni ghettos, qui especte les droits et la souveraineté des peuples du Sud et qui rompt avec l'OTAN.

Jaime Pastor est membre d'Izquierda Anticapitalista (IA). Traduit de l'espagnol pour le site www.lcr-lagauche.be


En route vers Madrid au sommet des peuples ! Contre les nouvelles conquêtes coloniales des Européens !

Les 17 et 18 mai, se tiendra à Madrid la septième édition du sommet des chefs d’États de l’Union européenne (UE) et d’Amérique latine/Caraïbe (ALC), avec au menu une véritable politique de re-colonisation économique et militaire et la volonté d’entériner des traités de libre commerce avec l’Amérique centrale, la Colombie et le Pérou. Fondement des politiques européennes centrées sur la concurrence et le démantèlement de l’État par les privatisations, la stratégie de Lisbonne vise à gonfler les carnets de commandes des transnationales et à approfondir les politiques capitalistes au détriment de la souveraineté des peuples.

Face à cette offensive, un réseau bi-régional euro-latino-américain s’est mis en place en 2004 pour mener des campagnes communes et organiser un contre-sommet appelé «Sommet des peuples: Enlazando Alternativas». Sa quatrième édition aura lieu du 14 au 18 mai à Madrid.

Ce Sommet des peuples est un moment fort de dénonciation et de mise en accusation des politiques de l’Union européenne qui favorise ses multinationales. Il permet de montrer à quel point les traités de libre commerce (TLC) signés par les pays d’ALC avec l’Europe n’ont rien à envier à ceux proposés par les États-Unis. Leurs conséquences sont tout aussi dramatiques: dépeçage des services publics, pillage des ressources naturelles, déplacement de communautés entières, dévastation de la biodiversité, épuisement des ressources hydriques, paupérisation de la main-d’œuvre, militarisation des territoires et criminalisation des luttes populaires et des migrants. Les multinationales européennes sont le fer de lance de cette politique.

Ce sommet alternatif vise également à mutualiser les luttes des peuples autochtones, latino-américains, caribéens et européens, et à travailler ensemble pour défendre les biens publics et renforcer la résistance et la mobilisation contre l’actuel système de domination.

Enfin, en Europe comme en ALC, des expériences de luttes et d’alternatives sont menées. Le Sommet est l’occasion de les faire connaître et notre participation active nous permettra d’articuler un contenu anti­capitaliste à la formule du «socialisme du xxie siècle»!

Des menaces sur les forces de gauche en Amérique latine

Malgré des années d’amélioration du rapport de forces en faveur de la gauche radicale en Amérique latine, les derniers mois en indiquent une possible inflexion: la droite latino-américaine, historiquement liée aux projets de domination impérialiste, progresse dans le sous-continent.

Ainsi, au Honduras, appuyés par les États-Unis et la droite latino-américaine, les conservateurs ont renversé Manuel Zelaya qui avait proposé un référendum en vue de convoquer une assemblée constituante et s’était rapproché de l’Alternative bolivarienne pour les Amériques. Zelaya provenait pourtant d’un des deux grands partis de l’oligarchie hondurienne.

Au Chili, Pinera, le candidat de la droite, a été élu président en l’absence d’une vraie politique de gauche menée par l’alliance de la Concertation. Cela marque l’accentuation des politiques libérales dures imposées par la dictature de Pinochet.

En Bolivie, des pressions permanentes s’exercent sur le gouvernement d’Evo Morales, et les gouverneurs des provinces les plus riches mènent un combat sécessionniste et putschiste avec l’aide de la droite internationale.

La Colombie, bras armé des États-Unis, accueille de nouvelles bases militaires et, en plus d’exterminer son opposition politique, relaye au côté du Pérou les menaces impérialistes sur les gouvernements du Venezuela, d’Équateur, du Paraguay et de Bolivie.

En Haïti, profitant du séisme qui a ravagé le pays, l’armée américaine conforte sa présence dans la Caraïbe et la France fait de même.

Présence impérialiste de l’Union européenne en Amérique latine

L’Union européenne est le deuxième partenaire commercial (15% du total) et investisseur dans cette région, derrière les États-Unis, et le premier bailleur d’aide au développement (60% du total reçu par la région).

La vague de privatisations initiée dans les années 1980 par les gouvernements latino-américains à peine libérés des dictatures a donné l’occasion aux multinationales européennes de se ruer sur le continent. Elles ont multiplié par quatre «leurs investissements» et se sont emparé des biens publics, de l’eau, de l’électricité, du gaz, du pétrole, des télécommunications. La coopération européenne a favorisé leur implantation et les traités de libre commerce ont mis en place une législation favorable au-dessus des lois nationales. Ces multinationales étaient parfois encore des entreprises publiques en Europe, comme France Télécom et EDF.

Aujourd’hui, l’Europe cherche à fiabiliser son approvisionnement en ressources naturelles et accentue sa pression pour leur exploitation.

Dans le secteur des services, les demandes de libéralisation par l’UE organisent en particulier la précarité des étudiants des universités publiques. Elles bloquent l’accès à des services essentiels à la population comme les médicaments génériques, les semences paysannes, l’eau potable et l’assainissement.

Par leur mépris des droits des populations et de l’environnement, les multinationales européennes, à l’instar de Bayer, Repsol, Nestlé, Union Fenosa, Banco Bilbao, Telefonica, Suez ou Veolia, ont très rapidement réussi à fédérer contre elles des mouvements populaires de masse. Elles sont défendues avec constance par les gouvernements européens de droite et sociaux-démocrates.

Des liens à tisser, des propositions convergentes à construire

Les accords et traités de libre commerce sont aux antipodes des intérêts des peuples et de la survie de la planète, en Amérique latine comme en Europe. Dans ce cadre, il s’agit de forger un mouvement de défense d’intérêts communs, en démantelant les axes d’oppression impérialiste centrés sur l’imposition du système capitaliste et la répression des mouvements critiques.

Un des enjeux du contre-sommet, comme son nom l’indique, est d’entrelacer les alternatives, apprendre les uns des autres et organiser des solidarités concrètes et politiques dans les luttes sur les deux continents.

L’Amérique latine a fourni ces dernières années de nombreuses raisons de se réjouir des progrès de la gauche sociale et politique. Ces succès sont souvent le fruit de décennies d’implantation comme c’est le cas du Mouvement des sans-terre du Brésil, des mouvements indigènes d’Équateur (la CONAIE), de l’AIDESEP au Pérou, de la CAOI qui fédère des organisations des peuples originaires de six pays. Ces mouvements précurseurs ont très tôt lié les questions écologiques, la préservation du milieu naturel avec une conscience anti-libérale puis anticapitaliste. Ainsi, les indigènes de Bolivie donnèrent naissance au MAS, actuellement au pouvoir dans le pays, qui accueillera bientôt le sommet de défense de la terre et contre le réchauffement climatique à Cochabamba. Ces luttes, comme celles des mouvements de Piqueteros (chômeurs) et des entreprises récupérées et contrôlées par leurs salariés ou les luttes contre la privatisation de l’eau, donnent du grain à moudre pour nos luttes en Europe.

En plus de Cuba, le Venezuela, la Bolivie et l’Équateur, malgré leurs limites et leur manque de définition stratégique, ont remis au goût du jour la possibilité concrète d’ôter le pouvoir des mains des castes dirigeantes, souvent racistes et toujours soucieuses d’amplifier leur taux d’enrichissement sur le dos des peuples de ces pays. Les progrès sociaux et l’alliance tissée avec les mouvements sociaux y ont aussi permis de populariser l’idée que le changement ne peut venir que d’une stratégie politique globale et internationaliste.

En Europe, la violence des attaques des classes dirigeantes domine le paysage politique. Malgré le slogan qui parcourt les pays européens, «Ce n’est pas à nous de payer leur crise», la situation est à l’évidence plus difficile pour la gauche anticapitaliste.

Même si la droite et la social-démocratie ont jusqu’à présent contenu les protestations populaires, à l’image de ce qu’il se passe en Grèce, elles n’en ont pas moins démontré leur incapacité à enrayer la crise. En tout cas, les gouvernements sont décidés à la faire payer par ceux qui n’ont que leur travail pour vivre.

Face à cette situation, de nouvelles formes politiques ont vu le jour comme c’est le cas du NPA en France ou du Bloc de gauche au Portugal (pour ne citer que celles-là). Comme en Amérique latine, il nous faudra élargir et amplifier les luttes syndicales, écologistes, anticapitalistes pour espérer faire fructifier les nouvelles formulations politiques.

À Madrid, il s’agira de s’alimenter des expériences latino-américaines et de tisser des liens avec l’ensemble des forces sociales et politiques qui partagent avec nous l’objectif du renversement du capitalisme.

Madrid du 14 au 18 mai

Un forum social, une assemblée des mouvements sociaux, une grande manifestation internationale le dimanche 16, un Tribunal populaire des peuples pour lutter contre l’impunité des multinationales, un meeting anticapitaliste le samedi soir sont au programme, consultable sur: www.enlazandoalternativas.org


Sommet UE/Maroc : construire des résistances et des alternatives à un projet d’inspiration coloniale

Le sommet UE/Maroc, tenu le 8 mars 2010 à Grenade (Espagne) n’est qu’une étape dans ce que l’on appelle le « Partenariat euro-méditerranéen », devenu Union pour la Méditerranée, après la célébration sans grand succès du 10e anniversaire du processus, lancé à Barcelone en 1995, entre l’Union européenne et les pays des rives Sud et Est de la Méditerranée.

Cette Union a non seulement une dimension économique et commerciale mais aussi une dimension politique et culturelle. Officiellement, il s’agit de créer une zone de paix et de stabilité, de prospérité partagée et de dialogue entre les peuples.

C’est dans ce contexte que le Maroc a été gratifié, à partir d’octobre 2008, d’un « statut avancé » aux contours juridiques nébuleux, mais qui affiche une volonté de plus grande intégration et de meilleurs échanges entre les deux entités. C’est du moins la façade qui est présentée au public. La réalité est quelque peu différente.

Echange sans circulation

Comment croire à une volonté de meilleurs échanges entre les peuples quand les frontières continuent à se fermer chaque jour davantage ? Les ministres de l’intérieur et de l’immigration de l’Union Européenne viennent d’adopter le 25 février dernier 29 propositions rédigées par Eric Besson, ministre de l’immigration et de l’identité nationale du gouvernement français, qui visent à renforcer la militarisation des frontières européennes, faciliter les expulsions et impliquer davantage les pays du Sud dans la fermeture des frontières, empêchant toute possibilité de circuler librement entre les deux rives du détroit.

Pour ceux qui auraient quelques doutes à ce sujet, je voudrais vous raconter l’histoire de Najlae.

Najlae est une jeune marocaine, qui s’est réfugiée, lorsqu’elle a eu 14 ans, chez son frère à Montargis en France pour que son père ne puisse la marier trop jeune. Mais son frère s’est révélé une personne violente et, lassée d’être régulièrement frappée, elle est allée porter plainte à la gendarmerie de son lieu de résidence. Au lieu d’enregistrer sa plainte, les gendarmes l’ont arrêtée et, en moins de 15 heures, l’ont mise dans un avion, le visage encore tuméfié et plein de contusions, pour l’expulser vers le Maroc. Cette histoire a suscité une grande émotion en France et le Président a finalement dû annoncer qu’il autorisait son retour. Mais il y a des dizaines de Najlae qui attendent leur expulsion dans les centres de rétention ici en Espagne, et même à 12 kilomètres du territoire marocain, au centre de rétention d’Algesiras.

A quelques jours à peine du sommet qui doit réunir les ministres européens avec leurs collègues marocains, est-ce là l’image que l’on veut donner de la coopération entre les deux entités, est-ce ainsi que les gouvernements européens tiennent en considération les citoyens des pays amis ?

Disons-le clairement, s’il ne s’agit pas de dialogue entre les peuples, de quoi va-t-on parler dans ce sommet ? Clairement d’affaires, d’argent, de profits.

Le processus euro-méditerranéen s’inscrit explicitement dans le cadre des politiques libérales du « Consensus de Washington » et a pour ambition de protéger et élargir les opportunités d’affaires pour les entreprises et les investisseurs européens en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, en ouvrant les économies de leurs voisins du Sud au libre-échange et, au-delà, aux marchés mondiaux.

Certains dossiers sont gérés au niveau de toute la zone méditerranéenne (énergie, transport, sécurité, contrôle de la migration, lutte contre le terrorisme, commerce, etc.) mais la majeure partie des projets sont décidés dans le cadre des accords bilatéraux signés entre l’Union européenne dans son ensemble et chacun des pays tiers méditerranéens séparément (souligner la différence de poids des « associés » et la dissymétrie à l’heure de s’assoir à la table de négociation.). Voilà quel est le contexte du sommet de Grenade, à mi-parcours du programme indicatif Maroc 2007-2013.

Un projet européen

Il est évident depuis le début que cette association entre chaque pays de la Méditerranée méridionale et orientale pris séparément et l’entité européenne dans son ensemble, est un projet conçu, mis en œuvre et contrôlé par l’Europe. C’est « un programme de coopération proposé par l’Union européenne et les pays de la Communauté européenne à ses voisins du Sud » [1]. Et, dans le cadre de la Politique Européenne de Voisinage, c’est la même chose qui est proposée aux pays de l’Europe de l’Est (Georgia, Belarus,…). Ce qui est visé est en réalité de former autour de l’Union européenne « un cercle de pays bien gouvernés, avec lesquels l’Union Européenne puisse avoir des relations étroites, basées sur la coopération, qui se concrétise principalement avec trois objectifs : l’externalisation de la gestion des flux migratoires, le développement de toutes les réformes qui assurent un environnement favorable aux affaires et la création d’une zone de libre-échange. » [2]. L’élimination des taxes douanières sur les biens manufacturés est déjà très avancée, tandis que les négociations sur l’agriculture et la pêche s’avèrent plus difficiles.

La 1re priorité est la sécurité de l’Union Européenne : creér une zone de sécurité, un sas, permettant de filtrer (ou bloquer) les flux migratoires vers l’espace européen et ses frontières. Il s’agit d’une sous-traitance de la surveillance des frontières européennes auprès des pays voisins, à l’Est comme au Sud, et on a vu, avec les morts de Ceuta et Melilla en 2007, avec la situation dans les prisons libyennes ou aux postes de frontière algériens, le peu de cas fait du respect des droits et de la sécurité des personnes. Et aussi comment les citoyens des pays du Nord de l’Afrique, en échange de la coopération de leurs gouvernements, n’ont reçu aucun traitement de faveur lorsqu’ils vont faire des queues interminables pour demander un visa distribué au compte-goutte.

Nous sommes donc loin, avec cette politique de voisinage, d’un processus d’intégration régionale, tel qu’il a été planifié lors de la création de l’Union Européenne. Loin de prévoir une extinction progressive des obstacles à la libre circulation des personnes, comme cela a été le cas en Europe, il s’agit au contraire d’élever des murs toujours plus hauts, des grilles, des visas et de mettre en place un programme de contrôle des frontières, Frontex qui va être renforcé, y compris au niveau de son budget, dans le cadre des 29 mesures proposées par le gouvernement Sarkozy.

Un autre outil de cette politique de construction de barrières et d’obstacles à la circulation des personnes, ce sont les accords de réadmission que beaucoup de pays du Sud –dont le Maroc- refusent de signer, tout au moins avec l’Union Européenne dans son ensemble, car des accords bilatéraux de ce type ont déjà été maintes fois signés. Il ne fait aucun doute que les 29 propositions et la question de la réadmission des personnes vont être présentées à « l’associé » marocain. Et il convient de souligner que cette politique migratoire pénalise tout autant les ressortissants des pays voisins (Maroc, Algérie, Tunisie) que ceux qui proviennent des pays du Sud du Sahara. Le Maroc et les autres pays d’Afrique du Nord sont transformés en pays vassaux chargés du contrôle des flux migratoires et de la répression de la circulation des personnes, tant à leurs frontières Nord qu’à leurs frontières méridionales, pour, en fin de course faire en sorte que le « Clandestino », comme l’appelle Manu Chao, retourne à son point de départ. Cette question est aujourd’hui considérée comme prioritaire, une condition préalable à la concrétisation des accords d’association.

C’est ainsi que le Maroc s’est transformé en impasse pour un bon nombre de ressortissants subsahariens qui y vivent dans une situation de grande précarité car il n’existe aucune procédure de régularisation de leur séjour dans ce pays, pas même pour les réfugiés reconnus comme tels par le bureau du Haut Commissariat aux Réfugiés installé à Rabat à la demande de l’Union Européenne pour filtrer les demandes d’asiles sur le territoire européen.

La 2e priorité est la poursuite des réformes permettant la libéralisation économique et l’ouverture aux marché mondiaux.

Pour faciliter la mise en place de la Zone de Libre Echange euro-méditerranéenne, l’Union européenne (et les multinationales) ont défini quatre domaines prioritaires (je cite les termes d’une note introductive rédigée par l’Union Européenne)

- l’adoption des dispositions adéquates en matière de règles d’origine, de certification, de protection des droits de propriété intellectuelle ;

- la poursuite des politiques fondées sur les principes de l’économie de marché et de l’intégration de leurs économies ;

- l’ajustement des structures économiques et sociales, la priorité étant accordée à la promotion et au développement du secteur privé et à la mise en place d’un cadre institutionnel et réglementaire approprié ;

- la promotion des mécanismes visant à développer les transferts de technologie.

Les accords d’association sont donc des accords permettant d’imposer aux pays du Sud tout le « package » des politiques libérales d’ouverture totale à l’investissement et à l’installation directe d’entreprises européennes sur son territoire Cela ressemble beaucoup à un processus de recolonisation directe, après des années de néo-colonialisme.

Chacun des objectifs que je viens de citer a été préparé par un processus énergique de réformes législatives et réglementaires qui ont permis de remodeler de fond en comble le système économique et les sociétés du Sud, avec pour but déclaré de susciter l’initiative privée, c’est-à-dire la marchandisation de toutes les activités humaines.

La première phase a été celle de la dérèglementation : code des investissements, activité bancaire et boursière, code du commerce, droit des sociétés, assurances et places off-shore, flexibilisation du travail, réforme du système fiscal, de l’administration publique, de la justice des affaires, levée du contrôle des changes et des protections douanières, création de zones franches. Tout ce qui protégeait un minimum l’économie nationale a été démantelé.

Parallèlement on a favorisé la privatisation des entreprises et établissements publics, la mise en gestion déléguée des transports urbains, de la distribution de l’eau et de l’électricité, de l’assainissement, la libéralisation de l’école, de la santé, de la poste, de l’audiovisuel. C’est ce qui a permis au grand capital et tout particulièrement aux investisseurs étrangers, de s’installer dans les niches les plus rentables.

Ce vaste chantier a essentiellement été financé par l’UE (appuyée par la Banque Mondiale et le FMI) et se poursuit dans le plan d’action régional 2007-2013 par la libéralisation du transport (indispensable pour accompagner le libre-commerce) et la création d’une Zone euro-méditerranéenne de l’énergie, qui sera vraisemblablement reliée aux pays producteurs de pétrole du Sud du Sahara..

La 3e priorité est la finalisation de la zone de libre-échange, prévue pour 2012 avec la généralisation de l’ouverture des services (tourisme, banque, assurances, communication, etc.) pour faciliter le transfert et la participation du capital étranger aux opportunités de profit qu’il peut y avoir dans l’un ou l’autre de ces secteurs. Mais il reste à résoudre deux questions épineuses pour finaliser la Zone de Libre Echange : l’agriculture et la pêche.

Mais avant d’aller plus loin, soulignons d’abord qu’aucun bilan sérieux n’a été fait avant de poursuivre le projet initial (c’est ce qui se fait normalement lorsque l’on arrive à mi-parcours).

Si on le faisait, on s’apercevrait que seuls les pays producteurs de pétrole ont pu améliorer leur position et tirer profit de l’ouverture de leurs marchés. Dans les autres pays, Maroc, Egypte, Jordanie, Tunisie, le déficit de la balance commerciale et financière continue à croître. Encore convient-il de relativiser les chiffres car, du fait de l’ouverture à l’investissement étranger, une grande partie des exportations (en biens et capitaux) sont réalisées par des entreprises étrangères.

Il n’est pas davantage fait mention de la crise actuelle et de la façon dont elle a affecté tous les pays de la zone (et du monde), en raison de l’ouverture de leurs économies et de leur intégration au marché mondial. Même si cette ouverture a permis à quelques investisseurs nationaux d’en tirer quelque profit, jouant en particulier avec le puzzle des accords de libre-échange signés avec différentes entités (Etats-Unis, par exemple), le fait est que cette Zone de Libre Echange favorise principalement les pays de l’Union Européenne, sans apporter pour autant aucune protection particulière à leurs citoyens face à la crise.

Mais revenons au thème de l’agriculture. Tous les officiels, toute la presse, considèrent que les accords qui ont été négociés avec le Maroc pour ce secteur sont très favorables au Maroc et Zapatero a même dû annoncer que ce dossier ne serait pas discuté à Grenade, de peur que les agriculteurs espagnols, les andalous surtout, ne se mettent sur pied de guerre au moment du sommet (cela dit, reporter la discussion ne change pas grand-chose : les accords sont seulement en attente de signature et ratification). C’est vrai que la liste des produits qui peuvent désormais entrer librement sur le marché européen s’est allongée, tandis que pour d’autres produits, les quotas d’exportation vont augmenter de manière sensible (40% dans 4 ans pour les tomates, 150% pour les courgettes et les concombres, plus de 3500% pour les fraises !). C’est vrai aussi que cela pourrait être une mauvaise nouvelle pour les producteurs espagnols (mais en échange, ils pourront à leur tour pénétrer avec plus de facilité sur les marchés marocains avec des produits tels que les olives et l’huile d’olive, les fruits à os, le melon…, que le Maroc produit déjà en quantité.

Mais, est-ce réellement une bonne nouvelle pour les agriculteurs marocains ? Nous connaissons déjà les ravages de l’agriculture intensive dans la zone d’Almeria ou Agadir. Quelles vont être les conséquences de l’intensification des cultures dans des régions qui connaissent déjà des problèmes (dans le Souss, l’eau qui était puisée à 30 ou 50 mètres il y a quelques années, doit maintenant être cherchée à 200 ou 300 mètres, quand on a assez d’argent pour acheter des moteurs assez puissants). Que va-t-il se passer dans la région de Larache si l’on multiplie la production de fraise par 3500 ? Concentration des terres, disparition et prolétarisation de la petite paysannerie, dégradation de la terre, désertification. Est-ce bien sûr que ce soit une bonne nouvelle pour le peuple marocain ? A quoi lui sert-il de produire des framboises ou des brocolis ? Il ne consomme pas ces produits qui de toute façon sont destinés à l’exportation et ne sont pas cultivés pour la consommation intérieure.

Et il faut encore ajouter que les producteurs qui vont produire ces denrées (la tomate et la fraise par exemple) sont principalement des grandes sociétés transnationales, qui ont leur siège à Vienne, Amsterdam… ou en Espagne) et qui louent et achètent des terres dans le monde entier.

Les accords commerciaux sont faits pour eux, et pas pour les petits producteurs ou les populations. Ceux qui vont vendre massivement des tomates et des fraises ne sont pas principalement des Marocains (il y en quelques uns quand même) mais de grandes sociétés qui exploitent au Maroc (mais aussi en Espagne, en Chine ou à Madagascar), la terre, l’eau et la sueur, pour en tirer de juteux bénéfices. Ce n’est plus de l’agriculture, c’est de l’investissement.

S’il faut s’insurger contre les accords UE-Maroc, il est important de ne pas se tromper de cible et de savoir exactement contre qui on proteste. La concurrence n’est pas entre les paysans marocains et espagnols, ni non plus entre les travailleurs agricoles qui souffrent et peinent des deux côtés du détroit. Elle est entre les petits producteurs et les travailleurs face aux grandes multinationales de l’agro-industrie et de la distribution (car derrière tout cela il y a Danone, Nestlé, Lidl, Carrefour et Cie)

Refuser la concurrence et tisser des solidarités

Il y aurait encore beaucoup à dire sur cet accord entre l’Union Européenne et le Maroc (et plus largement entre l’Union européenne et les pays tiers méditerranéens) et sur le dogme libre-échangiste en général, qui fonctionne en sens unique et n’est qu’un outil à disposition du grand capital pour pouvoir réaliser des profits depuis n’importe quelle partie du monde à partir de n’importe quel type d’activité économique.

L’investissement espagnol au Maroc a augmenté très rapidement et de nombreuses entreprises se sont installées de l’autre côté de la mer. Mais les citoyens ordinaires vivent des deux côtés les mêmes problèmes :

- flexibilité et précarité du travail

- chômage structurel

- économie de consommation déconnectée des vrais besoins des personnes et orientée exclusivement vers la recherche du profit maximum pour les investisseurs

- économie destructrice des ressources naturelles, des biens publics et de l’environnement

- démantèlement des services publics.

C’est pourquoi nous devons nous unir pour dire non au dogme libre-échangiste et rejoindre les campagnes internationales pour l’abrogation des Accords de libre-échange (un autre sommet va se dérouler au mois de mai à Madrid, relatif au commerce avec l’Amérique latine et une grande mobilisation se prépare pour « entrecroiser les alternatives ».)

Nous devons refuser d’accepter la concurrence entre les mains d’œuvre, que le grand capital fait bouger et recrute à sa guise, tandis que le travailleur ne peut circuler librement ni vendre sa force de travail là où elle est le mieux payée. C’est pourquoi il est si important de défendre la liberté de circulation. Pourquoi seuls pourraient circuler le capital et les marchandises et non la main d’œuvre, condamnée à une exploitation maximum, que ce soit dans son propre pays ou dans le cadre de la migration légale ou non.

C’est pourquoi nous devons construire une Méditerranée solidaire, des peuples, une Méditerranée:

- de coopération et non de compétition

- d’échange réel entre les cultures et les gens, et non de colonialisme

- de solidarités dans les luttes pour entrecroiser les alternatives contre le libéralisme dévastateur et les appétits du grand capital, responsables de la crise financière et économique, sociale et écologique qui nous atteint tous. Pour y parvenir nous devons tout d’abord lever les barrières, matérielles et symboliques qui tentent de nous séparer.

Lucile Daumas, ATTAC Maroc / CADTM. Grenade, 3 mars 2010

Notes

[1] Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP), document de stratégie régionale (2007-2013) et programme indicatif régional (2007-2013) pour le partenariat euro-méditerranéen

[2] Ibid.


Traité de Lisbonne: Un bond vers l'Europe des inégalités

Maintenant que le verrou irlandais a été levé, le Traité de Lisbonne devrait rentrer en application. Il aura des conséquences négatives sur la vie quotidienne des populations de l’Union européenne.

Après le «oui» irlandais, tout ce qui justifiait le rejet du Traité de Lisbonne qui n’était qu’un copier-coller du Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TCE) va devenir réalité. Les millions de femmes et d’hommes qui ont dit « non » à une Europe des inégalités vont, dans un contexte aggravé par la crise du capitalisme, devoir maintenant en subir les effets.

Il n’est pas inutile de rappeler ce qui attend celles et ceux qui ne vivent que de leur travail – quand ils en ont. Il n’est pas non plus inutile de garder en mémoire l’appui qu’ont apporté à ce traité, aux côtés de la droite, les socialistes et les Verts.

Laïcité

« L'héritage religieux » est défini comme la « source de la démocratie, de l'État de droit et des libertés fondamentales » ; l’Union européenne (UE) reconnaît les Églises, mais pas la laïcité (le mot et la chose sont absent des textes). L’Europe des Lumières s’obscurcit dangereusement. Les droits des femmes à peine conquis sont directement menacés. Le Vatican triomphe.

Démocratie

Si quelques dispositions renforcent le poids du Parlement européen, il reste largement un Parlement croupion : il n’est pas l’unique législateur et ses pouvoirs de contrôle sont limités (pas de séparation des pouvoirs) ; il ne peut pas proposer ses propres textes. Le monopole de l’initiative reste à la toute puissante Commission européenne qui peut s’opposer aux attentes du Parlement et du Conseil des ministres, tous deux pourtant issus du suffrage universel.

Le citoyen peut changer, par le suffrage universel, son maire, son député, son gouvernement, mais il est totalement impuissant face à une Commission européenne qui n’est pas comptable de ses actes. Le traité ne modifie pas le caractère opaque de la Commission européenne plus que jamais aux ordres des lobbies de la finance et du business. Il consacre un défaut de démocratie qui, lorsqu’il se constate ailleurs, provoque les condamnations indignées de l’Union européenne.

Droits sociaux fondamentaux

La Charte des droits fondamentaux traduit un terrible recul par rapport à la Déclaration universelle des droits de l’homme, au Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il est en recul par rapport à la Charte sociale de Turin de 1961. Ni le droit à la santé, ni le droit au logement, ni le droit à un revenu minimum à une pension de retraite, à une allocation de chômage ni le droit à l’accès à un certain nombre de services (transports, poste, etc.), ni le droit à la sécurité sociale et à l’aide sociale, ne sont formellement garantis dans ce texte. Pire, ces droits, lorsqu’ils sont mis en œuvre dans certains États membres, sont désormais directement menacés.

Néolibéralisme des politiques européennes

La disparition de la formule « concurrence libre et non faussée » ne change rien. Un article du traité rappelle le primat d’une « économie de marché ouverte où la concurrence est libre » et un protocole (même valeur que le traité) indique que « le marché intérieur comprend un système garantissant que la concurrence n'est pas faussée ». La seule politique de l’UE, c’est de mettre en concurrence toutes les activités humaines. Angela Merkel l’a confirmé : en ce qui concerne le libéralisme des politiques, « rien ne va changer ». Ce texte rend impossible tout espoir d’Europe sociale.

Services publics

L’UE ne protège pas les services publics. Ils sont soumis aux règles de la concurrence. En fait, « la liberté d'établissement et la liberté de circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services continuent de revêtir une importance capitale ». Le Traité de Lisbonne soumet comme jamais les services culturels, d’enseignement, de santé et sociaux à la logique du marché.

Mondialisation néolibérale

Le texte renforce le poids des accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il renforce les pouvoirs de la Commission européenne pour négocier à l’OMC. Les pouvoirs du Comité 133 sont renforcés. Son opacité demeure. La mise en œuvre de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS), dont l’objectif ultime est la privatisation de toutes les activités de services – nationales, régionales ou municipales – en sera facilitée.

Subordination de la majorité des 27 États à l’Otan

Le traité décide l’adhésion de l’UE à l’Otan, une organisation qui n’est pas européenne et dont la direction se trouve à Washington. « L'Otan reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l'instance de sa mise en œuvre. » Les États se sont engagés à augmenter leur capacité militaire. Le traité met en place une Europe militaire, auxiliaire des gendarmes du monde.

Raoul M. Jennar

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