Soulèvement populaire en Égypte: Acte II de la Révolution arabe
Par L. Sustar, A. Shawki, M. Omar, M. LeVine, H. el-Hamalawy, Sellouma le Samedi, 29 Janvier 2011 PDF Imprimer Envoyer

Il y avait au moins 25 000 manifestants rassemblés sur l'énorme place Tahrir au Caire ce 25 janvier lors de la plus grande manifestation politique vue dans la capitale égyptienne depuis plus de 30 ans. Des dizaines de milliers de personnes se sont retrouvées pour des manifestations dans des villes provinciales également. Au moins deux personnes ont été tuées lors de heurts avec les forces de sécurité de l'État égyptien.

Mais au lieu d'être intimidés par la répression de la police, les manifestants ont été capables de renverser le jeu avec la police égyptienne bien connue pour être violente  et de battre plusieurs policiers. Et à la suite de la manifestation, une série d'organisations démocratiques laïques ont appelé à une grève générale le 26 janvier.

Ce mouvement a mis sous les projecteurs cet État policier soutenu par les États-Unis dirigé par Hosni Mubarak, ce dictateur de 83 ans méprisé pour être le président d'une société où une petite minorité a amassé des richesses énormes tandis que plus de 23% de la population de 79 millions vit en dessous du seuil officiel de pauvreté. La résurgence des grèves et des manifestations de travailleurs égyptiens alimente maintenant le mouvement pro-démocratique.

Entretien avec Ahmed Chawki, rédacteur d'International Socialist Review, revenu récemment du Caire et l'activiste égypto-états-unien Mostafa Omar par Lee Sustar.

Quel impact l'insurrection en Tunisie a-t-elle eu en Égypte ?

Ahmed : En Égypte, tout le monde parle de la Tunisie. L'insurrection en Tunisie a mis en avant en Égypte les questions de manque de démocratie ainsi que les problèmes économiques.

Il y a une accumulation de griefs à tous les niveaux de la société à propos des exigences de la vie quotidienne. Les prix alimentaires montent et vont continuer à monter. Ensuite il y a le haut taux de chômage, le nombre élevé de sans-abris et le manque d'opportunités pour la jeunesse. Ce sont les mêmes problèmes qui sont au centre de la lutte en Tunisie et les gens ont été inspiré par les actions là-bas.

Mostafa : Des manifestants tunisiens ont donné des conseils tactiques aux manifestants égyptiens par Faceboook.

Par exemple, la plupart des manifestations organisées par les mouvements démocratiques ces dernières années rassemblaient autour de 3 ou 400 personnes. Habituellement la police les cassait ou bien arrêtait de nombreux manifestants.

Cette fois, les choses ont été différentes. Il y a eu une espèce de direction unifiée qui a fait du travail préparatoire pour les manifestations. En suivant les conseils des Tunisiens, les organisateurs au Caire ont décidé de ne pas se réunir en un seul lieu mais de se rendre en différents lieux et de converger vers plusieurs bâtiments gouvernementaux où ils se sont alors réunis. Cela a eu le résultat de faire échouer la police.

Dans le passé la police a parfois toléré des manifestations mais seulement pour en prendre le contrôle par la violence ou les arrestations. Cette fois la police n'y est pas parvenu. Des manifestants ont convergé vers le bâtiment du parlement et ont essayé d'en prendre l'assaut. D'autres se sont rejoints au siège de la télévision et de la radio où ils ont essayé d'entrer. La plus grande manifestation au Caire a été à la place Tahrir dans le centre-ville.

Le deuxième problème pour la police c'est qu'elle ne s'attendait pas à ce nombre de manifestants. Elle pensait qu'il y aurait quelques milliers de manifestants au Caire alors qu'il y en a eu au moins 10 000 place Tahrir et plus encore à d'autres endroits.

Qu'en est-il des manifestations en dehors du Caire ?

Ahmed : À Alexandrie, la police a été très agressive et a utilisé des balles en caoutchouc pour essayer de casser la foule. Mais les gens sont restés. Cela malgré que, comme d'habitude, la police arrêtait les activistes et harcelait leur famille.

Mostafa : La police a attaqué les manifestations en plusieurs endroits avec des balles en caoutchouc et des canons à eau. Elle a laissé les manifestations commencer et puis les a attaquées. Mais ça n'a pas marché. En réalité, les manifestants ont attaqué les forces de sécurité. Il y a plusieurs compte rendus de manifestants qui ont complètement battu les forces de sécurité et une vidéo fascinante de manifestants chassant la police.

L'ampleur des manifestations en dehors du Caire est le plus grand problème du gouvernement. À Suez, les gens ont refusé de se disperser et ont combattu la police dans une sorte de guérilla. À Alexandrie il y a eu une manifestation massive avec des dizaines de milliers de personnes suivie de meetings dans des places centrales. Il y a eu des scènes fascinantes — les gens apportaient des énormes affiches avec la photo de Mubarak et les brûlaient dans la rue. Ailleurs, dans quelques villes du Delta du Nil — une zone très industrielle — les manifestations étaient aussi très militantes. C'était presque une insurrection nationale.

Au Caire, un certain nombre de figures importantes de l'opposition ont joué un rôle. La principale est l'ex-candidat à la présidentielle Ayman Nour qui s'est assis avec les occupants de la place Tahrir.

Y-a-t-il des précédents de manifestations de cette échelle ? Qui les dirigeaient ?

Mostafa : Ça n'était plus arrivé depuis 1977 quand la place Tahrir avait été occupée pour protester contre les hausses des prix demandées par le FMI.

La direction de l'opposition unifiée s'est créée lors des élections parlementaires de décembre. Étant donné que l'élection était complètement truquée pour donner au régime de Mubarak une majorité écrasante, quelques 80 ou 90 anciens membres du parlement ont créé un « parlement de l'ombre » et y ont amené plusieurs partis d'opposition. Ce sont eux qui ont plus ou moins coordonné l'appel à manifestation.

Une partie des jeunes ont tenus des ateliers pour discuter comment préparer l'action en terme de tactique. Les Frères musulmans — le plus grand groupe d'opposition en Égypte — n'a pas officiellement soutenu les manifestations mais a autorisé ses membres à participer sur base personnelle.

Les manifestations ont été organisées en une dizaine de jours. Les organisateurs ont choisi la date du 25 janvier — le Jour de la Police, ce jour où en 1951 la police a battu les occupants britanniques. Les organisateurs voulaient diffamer la police le jour où elle célébrait son soi-disant jour de fête patriotique. L'intention était en partie de mettre en exergue la brutalité de la police. Les manifestations étaient aussi proche du jour anniversaire de l'insurrection de 1977 contre le néolibéralisme du FMI.

Cependant, les organisateurs savaient que ces manifestations seraient différentes. Une indication était le nombre de suicides ces derniers jours suivant l'exemple du martyr Mohamed Bouazizi — ce Tunisien diplômé sans-emploi qui s'est immolé par le feu après que la police lui ait interdit de vendre des fruits.

Quelle est la politique de l'opposition ?

Ahmed : Les Frères musulmans ont vaguement acquiescé aux mobilisations mais ne les soutiennent pas en réalité. Il y a cependant un large soutient aux manifestations au travers des classes sociales.

Même des parties de la classe moyenne qui pourraient être en faveur de la répression des manifestations voient d'un mauvais oeil que Gamal Mubarak, le fils du président, deviennent son successeur. Une grande part de la classe politique ne laissera par le fonctionnement de l'État être une affaire de famille.

Les manifestations ont posé la question de savoir si Mubarak va se représenter à la présidence à nouveau. Et le boycott des élections parlementaires ont rendu le parlement encore plus factice que d'habitude. L'utilisation de lois d'exception pour se maintenir est plus évident que jamais.

Mostafa : L'opposition libérale s'était battue pour lever les lois d'exception, pour organiser des élections démocratiques et pour arrêter la vente de gaz à Israël. Elle n'avait, au mieux, réussi à mobiliser que 1000 ou 2000 manifestants. Les médias ont donc dit que les manifestations du 25 janvier étaient sans précédent.

En fait, si on tient compte du nombre de travailleurs qui ont été impliqués dans des grèves ou des manifestations de travailleurs ces dernières années, on arrive à à peu près un million. Le mouvement des travailleurs s'est construit depuis quelques années, a pris de la vitesse et a obtenus des concessions de la part du gouvernement. Le gouvernement n'a pas toujours obtempéré mais les travailleurs ont gagné leurs grèves, au moins sur papier, et se sont sentis plus confiants.

Tout ça s'est construit avant la Tunisie. Ce que la Tunisie a fait — et on ne peut pas le sous-estimer — c'est changer l'équation. Les gens disent « la Tunisie est un petit pays. Si ils peuvent se retrouver à plusieurs dizaines de milliers dans les rues, s'immoler par le feu pour faire passer un message et changer le régime, nous allons le faire aussi ».

Vous pouvez le voir en lisant des lettres écrites à des journaux d'opposition. Il y a quelques semaines — après les élections parlementaires truquées — il y avait un sentiment d'espoir. Maintenant, disent-ils, il y a une raison d'espérer — nous devons avoir une révolution.

Tout ça est remarquable parce qu'il y a eu une animosité populaire contre la Tunisie depuis l'ère de Sadat dans les années 70. Quand les deux pays se rencontrent au football, il y a souvent effusion de sang — des gens ont été tués. Maintenant il y a des drapeaux tunisiens partout en Égypte.

Les exigences politiques des manifestations vont-elles se joindre aux demandes économiques des travailleurs ?

Mostafa : Je ne suis pas sûr de qui a appelé à la grève générale nationale. Mais ce qui s'est passé le 25 janvier dans la ville textile de Mahalla est révélateur. Une manifestation qui avait commencé le matin avec 200 personnes a atteint en fin de journée 45 000 personnes. Je pense que beaucoup de travailleurs veulent continuer à manifester.

L'autre chose remarquable est que la fédération syndicale nationale égyptienne — dirigée par des personnes engagées par le gouvernement — a partiellement lâché le gouvernement pendant les 2 semaines suivant l'insurrection tunisienne. Ils veulent un contrôle des prix, une augmentation des salaires et un système de distribution subsidié pour la nourriture. Les gens n'arrivent pas à trouver des produits de base comme le thé ou l'huile. Que les dirigeants du syndicat demande ça est sans précédent parce que ces gens ont soutenu le néolibéralisme. Ça, c'est l'impact de la Tunisie.

Pendant ce temps, les conditions auxquelles doivent faire face les travailleurs sont de plus en plus dures. Le taux de chômage officiel est de 12% mais est en réalité de 24 à 25%. Les prix alimentaires sont hors de contrôle. Un kilo de tomate — un produit de base — coûte 2$ ; il était de 35 cents il y a peu. C'est prohibitif pour un pays où les fonctionnaires gagnent à peu près 26$ par mois. La question de la faim est réelle. Et maintenant, le FMI fait pression sur le gouvernement pour supprimer les subsides sur l'essence.

C'est une raison importante pour laquelle — et en occident on ne s'en rend souvent pas compte — il y a eu une augmentation dans les luttes de travailleurs ces trois dernières années. Chaque jour il y a une grève — et le jour de l'action, il y a eu 12 grèves majeures. Le gouvernement les a calmées directement en promettant tout ce qui était demandé.

Les médias états-uniens se concentrent sur la supposée menace du « radicalisme islamique » en Égypte comme dans le reste du Moyen-Orient. Est-ce un facteur de cette lutte ?

Mostafa : Deux fois déjà, les Frères musulmans se sont abstenus de faire un quelconque appel à la grève générale ou à la manifestation nationale. Déjà en 2006 et de nouveaux cette fois ils n'ont pas soutenus le jour de colère.

Ils sont toujours la plus grande force politique du pays mais ils refusent de rentrer en confrontation avec le gouvernement. C'est vraiment le mouvement des travailleurs et la jeunesse radicale qui sont les forces qui mènent le mouvement, pas les Frères musulmans. Les Frères musulmans sont toujours le parti d'opposition principal avec le plus d'influence mais ils ne sont pas du tout derrière ce mouvement.

Beaucoup de jeunes et de travailleurs qui sont entrés dans le mouvement ces deux dernières semaines sont ouverts aux idées démocratiques et socialistes. Beaucoup de partisans des Frères musulmans également sont ouvert à une analyse différente — une analyse qui voit autre chose qu'uniquement un conflit entre l'Islam et l'occident. Par exemple, dans une manifestation, un homme qui était clairement religieux avait une pancarte disant que ça n'avait pas d'importance d'être musulman ou chrétien pour rejoindre la lutte.

C'est un grand changement depuis le 1er janvier, quand des attaques violentes contre des églises chrétiennes ont pu faire croire que le pays était à l'aube d'une guerre civile entre musulmans et chrétiens. On a vu plus d'attaques contre des églises chrétiennes l'année passée qu'à n'importe quel moment de l'histoire moderne de l'Égypte. Mais aujourd'hui, beaucoup de chrétiens ont rejoint la lutte commune avec les musulmans contre la police et l'État corrompu bien que la hiérarchie religieuse leur ait demandé de rester à l'écarte des manifestations.

Tout cela veut dire qu'il y a une ouverture pour la gauche — spécialement pour les socialistes — pour s'agrandir. Il y a du sang neuf dans le mouvement et les Frères musulmans ne se battent pas. C'est la gauche qui mène la bataille avec des nouveaux radicaux.

Que peuvent faire les soutiens au niveau international pour aider le mouvement égyptien ?

Mostafa : Mohamed El Baradei, l'ancien inspecteur des armes atomiques et un meneur du mouvement de la démocratie a récemment appelé la Secrétaire d'État Hillary Clinton à défendre les droits de l'Homme en Égypte et au Moyen-Orient.

Mais c'est complètement erroné. Les États-Unis ont été un soutien clé du régime en Tunisie et de loin le plus grand soutien à l'État égyptien. Le gouvernement états-unien est partiellement responsable des atrocités commises par le régime de Mubarak et il ne veut pas réellement d'une réforme démocratique.

Les activistes aux États-Unis ont donc un rôle important à jouer en exigeant que les États-Unis mettent fin à leur soutien au gouvernement égyptien et ses efforts pour maintenir un régime corrompu et autoritaire.

Publié le 26 janvier 2011 sur socialistworker.org — traduction française de Martin Laurent pour www.lcr-lagauche.be


« Depuis 2006, notre pays connaît les plus grandes grèves ouvrières depuis 1946 »

Hossam el-Hamalawy est un journaliste indépendant et blogueur du site 3arabawy. Mark LeVine, professeur à l'Université de Californie-Irvine, est parvenu à la contacter via Skype afin d'obtenir des informations de première main sur les événements qui se déroulent en Egypte. Il nous parle ici des causes et du développement de ces protestations massives; du rôle joué par la question palestinienne et la révolution tunisienne, des grèves ouvrières et du mouvement syndical, des islamistes, de la jeunesse et de l'utilisation d'Internet dans la révolte actuelle.

Pour quelle raison fallait-il attendre qu'éclate la révolution en Tunisie pour que les Egyptiens sortent en masse dans les rues?

Hossam el-Hamalawy: En Egypte, nous disons que la révolution en Tunisie a plus été un catalyseur qu'un instigateur, parce que les conditions objectives pour un soulèvement existaient dans le pays. Depuis plusieurs années la révolte était dans l'air. Nous avons eu, également, deux mini-intifada ou « mini-Tunisie », en 2008. La première, ce fut le soulèvement à Mahalla en avril 2008, suivie par un autre à Borollos, dans le nord du pays.

Les révolutions ne surgissent pas de rien. Nous n'avons pas, mécaniquement, une mobilisation en Egypte parce qu'il y en a eu une en Tunisie. Il n'est pas possible d'isoler les protestations actuelles des quatre dernières années de grèves menées par les travailleurs en Egypte, ou des événements internationaux comme l'Intifada Al-Aqsa et l'invasion de l'Irak par les Etats-Unis.

L'éclatement de l'Intifada Al-Aqsa fut particulièrement importante, parce que dans les années 1980 et 1990, l'activisme dans les rues avait effectivement été empêché par le gouvernement sous le prétexte de lutter contre les rebelles islamistes. Les mobilisations se sont réduites à celles des campus universitaires ou à celles des partis. Mais quand éclata l'Intifada en l'an 2000 et que la chaîne Al-Jazeera commenàa à transmettre les images, elle a inspiré notre jeunesse à prendre les rues, de la même manière qu'aujourd'hui la Tunisie nous a inspiré.

Comment se développent les protestations?

H.H: Il est encore trop tôt pour dire comment elles vont évoluer. C'est déjà un miracle qu'elles continuent après minuit, malgré la peur et la répression. Mais la situation est arrivé à un point tel que les gens en ont tout simplement assez, complètement assez. Même si les forces de sécurité parviennent à écraser les protestations aujourd'hui, elles ne pourront pas écraser celles qui se succèderont la semaine suivante, ou le mois suivant, ou plus tard dans l'année. Il y a, définitivement, un changement dans la mentalité et le courage du peuple.

L'Etat s'est servi du prétexte de la lutte contre le terrorisme dans les années 1990 pour en finir avec toute dissidence dans le pays, un truc utilisé par tous les gouvernements, y compris les Etats-Unis. Mais, une fois que l'opposition a un régime passe par des protestations massives, il est très difficile d'étouffer une telle dissidence. On peut planifier la liquidation d'un petit groupe de terroristes qui combat dans des ravins, mais que peuvent-ils faire face à des dizaines de milliers de manifestants dans les rues? Ils ne peuvent pas les tuer tous. Ils n'ont même pas la garantie que les soldats feront une telle chose, qu'ils tirent contre les pauvres.

Quelle est la relation entre les événements dans la proche région et ceux qui se déroulent en Egypte?

H.H: Il faut comprendre que le régional est local dans ce pays. En l'an 2000, les protestations n'ont pas commencé comme des protestations contre le régime, mais bien contre Israël et en soutien au Palestiniens. La même chose s'est passée avec l'invasion de l'Irak par les Etats-Unis, trois ans plus tard. Mais, une fois que tu descends dans la rue et que tu t'affrontes à la violence d'un régime, tu te poses des questions: pourquoi Moubarak envoie-t-il des soldats réprimer les manifestants au lieu de lutter contre Israël? Pourquoi le pays exporte-t-il du ciment en Israël pour qu'il soit utilisé pour construire des colonies au lieu d'aider les Palestiniens à reconstruire leurs maisons? Pourquoi la police est tellement brutale avec nous quand nous voulons seulement exprimer notre solidarité avec les Palestiniens, de manière pacifique?

Ainsi, les problèmes régionaux comme Israël et l'Irak deviennent des questions locales. En peu de temps, les mêmes manifestants qui lançaient des slogans pro-Palestiniens ont commencé à le faire contre Moubarak. Le moment décisif et spécifique, en terme de protestation, ce fut 2004, quand la dissidence intérieure à commencé à se manifester.

En Tunisie, les syndicats ont joué un rôle clé dans la révolution, vu leurs effectifs et leur militantisme, ils ont empêché l'écrasement des protestations et offert leur structuration organisationnelle. Quel est le rôle du mouvement ouvrier en Egypte dans le soulèvement actuel?

H.H: Le mouvement syndical egyptien a été durement réprimé dans les années 1980 et 1990 par la police, qui a utilisé des munitions de guerre contre des grévistes pacifiques en 1989 pendant les grèces dans l'industrie sidérurgique, et en 1994 contre les celles menées dans le secteur du textile. Mais depuis décembre 2006, notre pays connaît les plus grandes et soutenues vagues de grèves depuis 1946. Le détonateur, ce fut la grève dans l'industrie textile de la ville de Mahalla, dans le Delta du Nil, cité qui concentre la plus grande force de travail du Moyen Orient avec plus de 28.000 ouvriers. Elle commença sur des questions « économiques », mais elle s'étendit à tous les secteurs de la société, à l'exception de la police et des forces armées.

Comme résultat de ces grèves, nous avons arraché la création de 2 syndicats indépendants, les premiers depuis 1957; celui des contrôleurs des contributions, qui rassemble 40.000 employés du secteur public, et ceux des techniciens de la santé, avec plus de 30.000 membres, créé le mois dernier, en dehors des syndicats contrôlés par l'Etat.

Mais il est vrai qu'il y a une différence importante entre la situation chez nous et la Tunisie; elle réside dans le fait que, bien que ce pays était une dictature, il y existait une fédération syndicale semi-indépendante. Même si la direction collaborait avec le régime, les membres à la base étaient des syndicalistes militants. De sorte que, quand l'heure des grèves générales est arrivé, les syndicats ont pu jouer leur rôle. Mais ici, en Egypte, nous avons un vide, que nous espérons remplir très vite. Les syndicalistes indépendants, on les a étouffés par une véritable chasse aux sorcières dès qu'ils tentaient de s'établir, ils ont subi les attaques des syndicats d'Etat, ou soutenus par l'Etat, mais ils sont quand même parvenus à se renforcer malgré ces tentatives de les écraser.

Il est vrai aussi que, ces derniers jours, la répression s'est essentiellement dirigée vers les manifestants dans la rue, qui ne sont pas nécessairement des syndicalistes. Ces protestations ont rassemblé un vaste spectre d'Egyptiens; y compris des enfants de l'élite. De telle sorte que nous avons une combinaison de pauvres et de jeunes des villes, ensemble avec la classe moyenne et les enfants de l'élite. Je pense que Moubarak est parvenu à rassembler contre lui tous les secteurs de la société, à l'exception de son cercle intime de complices.

On a décrit la révolution tunisienne comme dirigée par la jeunesse et dépendante, pour son succès, de la technologie offerte par les réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter. Et maintenant les gens se focalisent sur la jeunesse en Egypte comme principal catalysateur. S'agit-il d'une « intifada juvénile » et pourrait-t-elle avoir lieu sans Facebook et autres technologies médiatiques?

H.H: Oui, il s'agit bien d'un intifada de la jeunesse. Quuant à l'Internet, il ne joue qu'un rôle dans la diffusion de la parole et des images qui se passent d'abord sur le terrain, dans la rue. Nous n'utilisons pas Internet pour nous organiser. Nous l'utilisons pour faire connaître ce que nous faisons sur le terrain, dans l'espoir d'encourager les autres à participer aux actions.

Aux Etats-Unis, le présentateur de TV Glenn Beck s'est attaqué à une universitaire âgée, Frances Fox Piven, pour un article où elle appellait simplement les chômeurs à organiser des protestations massives pour l'emploi. Elle a y compris reçue des menaces de mort. On est surpris en voyant le rôle crucial joué par les syndicats dans le monde arabe actuel, en tenant compte de plus de deux décennies de régimes néolibéraux dans toute la région dont l'objectif principal est justement de détruire la solidarité de la classe ouvrière. Comment les syndicats ont-ils pu maintenir une telle importance?

H.H: Les syndicats sont un véritable remède magique contre n'importe quelle dictature. Voyez la Pologne, la Corée du Sud, l'Amérique latine ou la Tunisie. Les syndicats ont toujours été utiles pour les mobilisations des masses. Il faut une grève générale pour abattre une dictature, et il n'y a rien de mieux qu'un syndicat indépendant pour le faire.

Existe-t-il un programme idéologique plus étendu derrière ces protestations, ou s'agit-il seulement de se débarrasser de Moubarak?

H.H: Chaque secteur a ses propres raisons pour sortir dans les rues, mais je suppose que si notre soulèvement aboutit à un succès et que nous chassons Moubarak, les divisions vont apparaître. Les pauvres voudront impulser une révolution avec des positions plus radicales, telles que la redistribution des richesses et la lutte contre la corruption, tandis que les « réformistes » voudront y mettre un frein, faire pression pour que les changements viennent « d'en haut », et limiter un peu les pouvoirs tout en maintenant l'essentiel de l'Etat.

Quel est le rôle joué par les Frères Musulmans et quel est l'impact de leur prise de distance par rapport aux protestations actuelles?

H.H: Les Frères Musulmans ont soufferts de divisions importantes depuis l'éclatement de l'Intifada al-Aqsa. Leur participation dans le Mouvement de solidarité avec la Palestine, quand elle s'est affrontée au régime, fut désastreuse. Basiquement, chaque fois que leurs dirigeants arrivent à un compromis avec le régime, et particulièrement les acolytes de leur actuel guide suprême, les cadres de la base se retrouvent démoralisés. Je connais personnellement de nombreux jeunes Frères qui abandonnent l'organisation, certains pour rejoindre d'autres groupes, les autres restent indépendants. A mesure que croît le mouvement de rue actuel et que les cadres inférieurs y participent, il y aura encore plus de divisions parce que la direction ne peut pas justifier le fait qu'elle ne fait pas partie du soulèvement.

Quel est le rôle des Etats-Unis dans ce conflit? Comment les gens de la rue voient-ils son attitude?

H.H: Moubarak est le second bénéficiaire de l'aide extérieur des Etats-Unis, après Israël. Il est connu pour être le mâton des Etats-Unis dans la région; c'est un instrument docile de la politique étrangère de Washington, un appui pour la politique de sécurité d'Israël et une garantie pour assurer le flux continu du pétrole tandis qu'il maintien les Palestiniens à genoux. De sorte que ce n'est pas un secret que cette dictature a bénéficié du soutien des gouvernements des Etats-Unis, depuis le premier jour, y compris pendant la trompeuse rhétorique pro-démocratique de Bush. Ainsi, il n'y a pas à être surpris devant les déclarations risibles de Clinton défendant plus ou moins Moubarak, vu que l'un des piliers de la politique étrangère des Etats-Unis est de maintenir des régimes stables sur le dos de la liberté et des droits civiques.

Nous n'attendons rien d'Obama, que nous considérons comme un grand hypocrite. Mais nous espérons que le peuple étatsunien – les syndicats, les associations de professeurs, les organisations étudiantes, les groupes d'activistes – se prononce en notre faveur et nous soutiennent. Ce que nous voulons, c'est que le gouvernement des Etats-Unis reste en dehors de cette affaire. Nous ne voulons aucune sorte de soutien de sa part, simplement qu'il cesse immédiatement d'appuyer Moubarak, qu'il retire toutes ses bases militaires du Moyen Orient et cesse également de soutenir Israël.

En dernière instance, Moubarak fera tout ce qu'il pourra pour se maintenir. Il adoptera sans doute une posture « anti-US » s'il pense que cela pourra l'aider à sauver sa peau. Mais en fin de compte, il est totalement discrédité et avant tout intéressé par ses propres intérêts; s'il estime que les Etats-Unis vont l'abandonner, il ira chercher un soutien ailleurs.

La réalité est que n'importe quel gouvernement « propre » qui arrivera au pouvoir dans cette région connaîtra un conflit ouvert avec les Etats-Unis, parce qu'il sera forcé de mener une redistribution rationnelle des richesses et en finir avec le soutien à Israël et aux autres dictatures. De sorte que nous n'attendons aucune aide du gouvernement des Etats-Unis, seulement qu'il nous fiche la paix.

Source:

http://english.aljazeera.net/indepth/features/2011/01/201112792728200271.html

Traduction française par Ataulfo Riera pour le site www.lcr-lagauche.be


L’embrasement lent et déterminé de l’Intifada égyptienne

Le régime de Moubarak continue son érosion et malgré la mainmise autoritaire, les signes de faille du système apparaissent de façon manifeste. Elles sont de trois types : démocratique, régionale et sociale. Démocratique car c’est un régime qui muselle fortement toute velléité d’opposition, même au sein de sa classe. Ces derniers temps, les partis d’opposition, même les plus mous, en ont fait les frais. A l’échelle régionale, Moubarak est un grand allié d’Israël et est soutenu financièrement par les États-Unis dans cette entreprise : le Ha’aretz décrivait la relation entre Moubarak et Netanyahou comme étant une « amitié formidable » et avançait que Bibi se sentait plus proche du grabataire égyptien de 82 ans qu’avec n’importe quel autre chef d’Etat [1]. On peut difficilement être plus explicite.

Ces failles sont nourries avant tout par la misère aggravée que subit le peuple égyptien. Depuis la séquence ouverte par le mouvement Kefaya en 2004 [2], le régime connaît une vague de grèves et mouvements assortie d’une impopularité grandissante. Le pouvoir égyptien a beau déployer d’importants modes de répression, il ne fait que révéler l’impasse dans laquelle il s’est plongé. Dans ce contexte de crise étatique, allant même jusqu’à une crise au sein de l’appareil dirigeant, les mouvements de la classe représentent le seul espoir de dépassement réel.

Les différentes échéances électorales, les législatives en 2010 et les présidentielles en 2011 peuvent être comprises comme indicatrices de stabilité du pouvoir. C’est un élément que Hosni Moubarak a bien compris. Voulant mettre toutes les chances de son côté, il a pris le parti de la répression généralisée. Résultat : son parti, le parti national démocratique, a gagné 80% des sièges au parlement. Toute opposition, aussi molle soit-elle, a été maladroitement muselée. Beaucoup de partis ont appelé au boycott du second tour, allant même, pour une centaine de parlementaires sortant, à appeler à la constitution d’un parlement parallèle.

A première vue, cette attitude pourrait être perçue comme un tournant depuis les déclarations médiatisées d’El Baradei qui, surfant sur sa notoriété internationale et l’obamania mondiale, promettait le changement. L’idée même qu’il puisse transparaître dans le jeu politique égyptien une alternative concurrence d’ores et déjà les projets de succession dynastique, d’autant qu’El Baradei apparaît comme un candidat crédible aux yeux de la classe dirigeante et des puissances impérialistes. Mais le recours aux vieilles recettes répressives n’est que révélateur de la nature de ce régime. L’état d’urgence est en vigueur depuis 30 ans, et tout acte de protestation, grève, manifestation, critique est interdit. La torture et la corruption sont une institution. Ce qui permet aujourd’hui de faire tenir le régime égyptien, c’est la violence.

La marge de manœuvre en terme de droits est tellement limitée que la diffusion d’une information est devenue un acte de militantisme, et cela l’est encore plus depuis les législatives [3]. Dans un pays dictatorial, toute divergence devient rapidement un problème politique, et la question de la non-neutralité de l’information ressort très clairement. Beaucoup de journalistes de presse et d’internet, socialistes ou membres des Frères musulmans ont été condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement. Cela a été le cas de Khaled Hamza, le webmestre des Frères musulmans. Les campagnes de libération des prisonniers politiques de manière générale ne sont pas qu’une question de principes humanistes. Elles peuvent servir d’appui pour faire cesser la barbarie étatique et donner plus de souffle aux mouvements sociaux.

Le faible taux de participation aux élections est une donnée qui illustre le fait que le peuple égyptien ne croit pas au changement par les élections, et y a peu cru en fait. La vague de protestations, la flambée des prix de première nécessité ont largement contribué à cette situation. A cela s’ajoute, comme précisé précédemment, que la mascarade électorale a été avérée, même à ceux qui nourrissaient encore des illusions. Pour reprendre un billet du camarade Hossam el Hamalawy paru l’automne dernier, il y a comme une colère latente dans l’air. Les discussions entendues de la rue arabe tournent pas mal autour de la volonté d’en découdre avec cette dictature : « Que Dieu mette à feu ce régime. Ce pays va s’embraser rapidement, très rapidement. On ne peut plus supporter ça. [….] Il y aura une deuxième intifada du pain comme en 1977. Et cette fois nous incendierons le pays. Nous n’irons pas brûler les voitures, les bus et les boutiques. Ils sont à nous. Non non. C’est eux que nous brûlerons. »

On ne peut prédire dans quelle mesure la violence d’état serait capable d’étouffer la vague de grèves et de manifestations dans le pays, et de faire perdre toute confiance dans la lutte. Mais on peut s’appuyer sur le fait que ces mouvements perdurent, malgré les revers qu’elles ont subis au regard du contexte démocratique. Pour la seule année 2010, on dénombre au moins 600 grèves, manifestations et sits-in. Parmi ces grèves, on peut citer celle des chauffeurs routiers, mais aussi des conducteurs de bus et minibus contre les nouvelles taxations. Elle a été lancée le 10 décembre 2010 et est d’après Al masry al youm la grève la plus massive, impliquant environ 100 000 routiers. L’ensemble du pays a ainsi été privé en approvisionnement de diverses matières premières tels que le métal, le ciment, le sucre ou le blé. Cette nouvelle taxation est d’autant plus honteuse qu’au même moment, le ministre chargé du pétrole signait un contrat d’exportation avantageux pour Israël. Officiellement, le ministère dénie cette information alors que d’après El Dostour, les journaux israéliens confirment ce contrat [4]. De nouveaux secteurs se sont mis en grève comme celui des employés de l’université américaine du Caire. La revendication principale portait sur l’augmentation des salaires.

Globalement, ces mouvements de grève s’engagent à partir d’une revendication spécifique pour élargir leurs demandes dans l’intérêt de l’ensemble des travailleurs : une revendication récurrente de ces dernières années porte sur la hausse du salaire moyen. Cela a été le cas lors de l’appel à la grève générale du 06 avril 2008 lancée par les ouvriers textiles de Mahalla, et lors de la manifestation du 07 novembre devant le syndicat de la presse qui a réuni et consolidé des réseaux de militants syndicaux et de grévistes.

La jeunesse est également pas mal mobilisée. Au mois de novembre, des étudiants et activistes ont manifesté contre le harcèlement policier dans les campus. L’exemple tristement emblématique reste le cas de Khaled Saïd, 28 ans, battu à mort par la police le 06 juin 2010 à la sortie d’un cybercafé. Cet événement a fait l’objet d’une campagne active des cyber activistes, internet étant le seul moyen pour eux d’organiser des manifestations.

Les coptes, partie prenante de la société égyptienne, sont également des victimes du régime. La bombe qui a explosé au 1er janvier a fait beaucoup de bruit, mais on parle peu des heurts récurrents entre la police et les coptes : le 25 novembre 2010, un manifestant copte a été tué. De même, des manifestations en réaction à l’attentat d’Alexandrie unissant musulmans et coptes contre le sectarisme ont rapidement dégénéré en affrontements contre la police.

On remarque souvent qu’à travers ces luttes s’engage une politisation de fond pour ses acteurs. Au début du mouvement de grève des travailleurs textiles de Mahalla, une ouvrière témoignait au début du mouvement qu’elle pensait qu’il fallait se manifester car Moubarak n’entendait pas la souffrance qu’endurait son peuple. A la fin du mouvement, elle ne se faisait plus d’illusions quant aux intérêts réels du président [5]. La bataille pour obtenir des cadres de lutte indépendants du pouvoir a été une nouveauté dans la période : la création du premier syndicat indépendant depuis 50 ans, celui des collecteurs de taxes foncières, est un saut qualitatif quant à l’inscription de la colère politique et sociale dans la durée.

En tentant de maintenir à tout prix et contre tous un régime de terreur qui devra invariablement s’écrouler, Moubarak mise gros : le récent discrédit du changement par en haut peut se transformer en opportunité pour la classe ouvrière égyptienne. Elle pourrait ainsi être l’actrice principale de la révolution politique à venir. La question est la suivante : comment s’en donnerait-elle les moyens ? Quels enjeux pour la région ? Il est compliqué d’obtenir des informations relatives à la structuration des mouvements d’opposition, ou syndicaux.

En termes d’opposition, le parti le plus implanté et qui garde une grande influence est celui des Frères musulmans. La confrérie existe depuis 1928, c’est donc le plus vieux parti d’Égypte, et elle revendique un million de membres et sympathisants. Ses orientations s’apparentent plus au réformisme qu’à l’islamisme, qui nommé ainsi n’a pas beaucoup de sens car il existe plusieurs tendances politiques différentes au sein de l’islam politique. Ses positions sont ambivalentes, elles peuvent initier des mouvements, souvent anti-impérialistes, tout en essayant de ne pas trop défier directement le régime [6]. On peut expliquer cette ambiguïté par le décalage qui existe entre la direction, en quête de respectabilité, et la base militante, présente dans les manifestations et grèves : leurs intérêts de classe divergent. La capacité des réseaux militants syndicaux et politiques à s’organiser en parti de la classe ouvrière est un élément important qui est lié à la possibilité d’écroulement du verrou anti-démocratique : le syndicat indépendant qui a été officiellement reconnu en 2009 est un pas qui doit retenir notre attention et notre soutien.

Des luttes de ces derniers mois en Egypte puis dans l’ensemble de la région naît un nouveau militantisme arabe [7]. Son surgissement est la conséquence directe du tournant néo-libéral que connaissent ces états bureaucratiques. La jeunesse se heurte à la fois à l’absence de perspective d’emploi après de longues études, corruption d’état oblige, mais aussi, plus récemment, à l’aggravation des conditions de vie. Les modes d’organisation de ce militantisme se manifestent par des formes de mise en réseau qui échappent aux autorités tels que le cyber-activisme, ou encore l’usage du téléphone portable pour les rassemblements de dernière minute. La diffusion spontanée des révoltes de la jeunesse d’un pays arabe à l’autre est bon signe : on est loin des affrontements nationalistes entre l’Algérie et l’Égypte causés par des matches de foot. Mais le repli nationaliste, notamment en Égypte, est une vraie menace pour le mouvement. C’est pour cela qu’une structuration entre les différents pays de la méditerranée est nécessaire pour inscrire cette solidarité, dont la forme élémentaire est le soutien à la lutte de libération de la Palestine.

Pour conclure, le premier levier politique en Égypte s’est produit grâce la campagne politique contre la guerre en Irak, qui s’est rapidement transformée en lutte pour les droits démocratiques. La question de la révolution permanente dans le monde arabe a été soulevée dans des contextes de regain des luttes. « [J]’ai appris les appels, les échos, la résonance presque immédiate de la Résistance palestinienne dans le peuple arabe. Certainement il fallait aider les feddayin à refuser malgré l’Amérique, l’Occupation sioniste mais sous cette exigence j’en distinguais une autre : l’Algérie, la Tunisie, le Maroc en secouant les feuilles avaient fait tomber les Français qui s’y cachaient » [8].

Pour les Etats impérialistes, l’Égypte est un pays clé au Moyen-Orient, et il l’est aussi pour les partisans de la révolution : c’est sous la pression des manifestations en solidarité avec Gaza à Rafah que Moubarak a levé -partiellement- le siège. Et comme disait justement la pancarte d’un manifestant : « la libération de la Palestine passe par le Caire ».

Sellouma

18 janvier 2011

[1] Voir l’article de Ha’aretz : http://www.haaretz.com/print-editio...

[2] Kefaya dont la traduction en français est « ça suffit » est un mouvement d’opposition politique au régime dictatorial. Il rassemble des mouvement politiques divers et a dans ses objections la fin de l’état d’urgence et des lois antidémocratiques.

[3] Voir l’article d’al jazeera english (en anglais) : http://english.aljazeera.net/indept...

[4] Voir l’article en anglais : http://www.almasryalyoum.com/en/new...

[5] Voir le documentaire (en arabe) sur la grève à Mahalla : http://vimeo.com/326691

[6] Voir l’article (en anglais) du Socialist Worker : http://www.socialistworker.co.uk/ar...

[7] Voir l’article d’Al Jazeera (en anglais) : http://english.aljazeera.net/indept...

[8] J. Genet, Un captif amoureux, p.31, édition Gallimard, 1995.

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