L’"Ordre des infirmiers" (momentanément?) écarté. L'action syndicale est payante!
Par Bert Inwood le Lundi, 10 Mai 2010 PDF Imprimer Envoyer

Pour beaucoup d'entre nous, cette affaire a été une affaire quelque peu sous-exposée et ceci, sans beaucoup d'intérêt médiatique. A tort, semble-t-il. Le vendredi 12 mars, des délégations des syndicats socialistes et chrétiens des secteurs de la santé ont mené une action devant le cabinet de la Ministre de la Santé Publique Laurette Onkelinx, contre la constitution d'un Ordre des Infirmiers.

L'année dernière, les syndicats avaient encore tiré la sonnette d'alarme et avaient demandé aux infirmiers d'envoyer massivement des cartes postales pour protester contre ce plan. Le 12 mars, des milliers de ces cartes ont été transmis. Après cette action, la ministre a déclaré qu'elle "n'avait jamais eu l'intention d'imposer quoi que ce soit". En effet, il revient au Conseil National de l'Art Infirmier (CNAI), organe d'avis du Service Public Fédéral de la Santé Publique, de donner un avis à la Ministre Onkelinx à ce sujet. En même temps que son plan plus concret de 90 millions d'euros pour "rendre la profession infirmière plus attractive", elle avait demandé un avis à ce Conseil sur "l'opportunité de créer un ordre des infirmiers". Sa proposition a agi comme un chiffon rouge devant un taureau chez les infirmiers et les syndicats sont entrés en action, en partant du Setca-FGTB, de la CNE, et des secteurs services publics (CGSP et CSC). Une absence remarquable et incompréhensible dans ce front syndical est celle de la LBC, qui se prévaut pourtant d'être le syndicat du personnel du non-marchand.

Le 18 mars, ce projet a été exposé au CNAI. Le résultat fut que le Conseil donna un avis négatif à la Ministre en ce qui concerne la création de l'Ordre. Il appartient maintenant à la ministre de tenir ou non compte de cet avis. Avec le démarrage des négociations en vue d’une nouvelle convention collective sectorielle pour tout le secteur du social/non-marchand pour les 5 prochaines années, ce serait un suicide pour la ministre de faire avaler de force cet Ordre au personnel infirmier.

Un Ordre des infirmiers: épée de Damoclès ou monstre du Loch Ness?

Chacun connaît la mauvaise réputation de l'Ordre des Médecins. Cette organisation corporatiste moyenâgeuse veut façonner le corps médical selon sa manière de penser et d'agir et traîne devant un tribunal d'exception tout qui ne marche pas au pas. Au moment où on envisage de supprimer cet ordre, on s'amène avec quelque chose de semblable! La même menace plane au-dessus de la tête des infirmiers. Ils ne veulent être punis de travailler comme infirmier. Ce qui leur pendait au-dessus de la tête est hallucinant, car cet ordre veut intervenir comme:

1. un ordre répressif (amendes jusqu'à 2500 euros et jusqu'à deux ans de suspension sans possibilité d'exercer un recours)

2. un ordre d'autorité (à côté de l'employeur, encore une autorité qui est à égalité avec le pouvoir judiciaire)

3. un ordre d'imposition (la cotisation à l'ordre est prélevée automatiquement sur le salaire).

En Flandre, l'Alliance Nationale des Infirmiers et Sages-femmes Catholiques (NVKVV) a déclaré en juin 2008 dans leur bulletin d'information que les infirmiers wallons étaient grands partisans d'un Ordre (sic!). La NVKVV elle-même y a toujours été opposée et avec cette déclaration elle a raté son coup, vu la réaction massive d'infirmiers, provenant également de Wallonie!

Les raisons de sa résistance sont plus opportunistes qu'idéologiques. Elles expriment clairement dans leur Newsletter de juin 2008 que les infirmiers ne paieront plus aux organisations professionnelles s'ils sont obligés de payer une contribution à l'ordre. Avec comme conséquence que les organisations professionnelles s'effondreront comme des châteaux de cartes.

Les infirmiers sont donc avertis que cette proposition refait surface après un certain temps comme un monstre du Loch Ness. Ce monstre est cependant mythique, tandis que les propositions, elles, sont bien réelles et menaçantes. Peut-être que la Ministre n'a pas très bien choisi le timing, juste avant le début des négociations et actions pour une nouvelle convention collectives sectorielle? En France, il existe déjà un tel Ordre des Infirmiers/ières contre lesquelles des actions massives ont été menées. Et quand il pleut à Paris, il goutte à Bruxelles.

Un tel ordre existe aussi au Canada et en Grande-Bretagne. Au Canada, l'Ordre inflige même une amende aux infirmiers qui refusent de faire des heures supplémentaires!

Voir ci-dessus