Un bilan positif pour la campagne européenne de la LCR
Par Ataulfo Riera le Lundi, 29 Juin 2009 PDF Imprimer Envoyer

Absente du terrain électoral « sous son propre drapeau » depuis de très nombreuses années, la LCR se trouvait donc devant un énorme défi en participant aux élections européennes du 7 juin dernier. Malgré un score très modeste (près de 8000 voix), ce défi a été relevé avec succès à plusieurs points de vue.

Comme le soulignait notre «Déclaration de la LCR sur les élections de juin 2009» adoptée au mois d'octobre 2008, «Nous faisons le choix de déposer une liste aux élections européennes car ces dernières seront l'occasion de se battre en faveur d'un programme clairement anticapitaliste, démocratique, féministe, écosocialiste et internationaliste (...) Si nous ferons tout pour obtenir un maximum de votes, nous ne nous faisons pas pour autant la moindre illusion sur l'ampleur de notre résultat. Notre bilan se fera avant tout sur notre capacité à mener une campagne dynamique».

Parmi les objectifs politiques de notre campagne, cette «Déclaration» d'octobre pointait notre volonté d'affirmer une opposition résolue à l'Union européenne capitaliste et le fait -déterminant selon nous- que dans le contexte de la crise du capitalisme seules les luttes et les mobilisations sociales coordonnées permettront d'inverser le cours des choses en faveur de la majorité. De ce point de vue là, on peut affirmer sans détour que l'objectif a été rempli puisque nous avons clairement axé notre campagne sur le terrain de ces luttes.

Nous avions également affirmé que nous étions favorables et disponibles pour une vaste unité électorale des forces de la gauche. C'est donc finalement avec le PSL (Parti Socialiste de Lutte) qu'un accord unitaire sur une base clairement anticapitaliste et contre l'Union européenne a pu se réaliser au scrutin européen. Aux régionales, nous participions à une liste plus large à Bruxelles (voir ailleurs dans ce numéro) et nous appelions à voter pour les trois listes du PSL en Wallonie.

Nos résultats électoraux

Les résultats chiffrés, avec 7.954 voix (0,32%) sont bien sûr -et sans surprise- très modestes. Ils reflètent bien notre implantation, l'état de nos forces militantes, nos moyens matériels et financiers limités ainsi que l'existence de quatre listes concurrentes à la gauche du PS et des Verts. Le tout dans un contexte marqué par l'absence de mobilisations et de luttes sociales d'ampleur et massives puisque nous ne sommes qu'au début de la crise capitaliste, que ses effets ne se font pas encore sentir dans toutes les couches de la population et qu'elle suscite, comme cela a toujours été historiquement le cas dans sa phase initiale, un sentiment de crainte peu propice à ces mobilisations ou à «l'audace» électorale.

Enfin, même si le phénomène joue d'une manière moindre aux européennes qu'aux régionales, comme toutes les autres listes de la gauche radicale, nous avons subi la forte pression d'un «vote utile» significativement renforcé par le clivage «gauche»-droite impulsé en fin de campagne par le PS face au MR d'une part et par la forte progression d'Ecolo, qui a été vu par un électorat de gauche -et de droite- comme un instrument «utile» pour sanctionner le PS ou l'éjecter du pouvoir.

Collège électoral francophone:

PTB+: 28.483 (1,16%)

LCR-PSL: 7.954 (0,32%)

CAP-d'Orazio: 7.626 (0,31%)

PC-GE: 7.533 (0,31%)

En termes de classement dans la gauche radicale, nous nous situons bien après le PTB et très légèrement devant le PC et le CAP-d'Orazio. A cet égard, il s'agit d'un résultat qu'on ne peut sous-estimer si l'on considère que, contrairement au PC, au PTB ou au CAP, nous avons mené une campagne avec un profil et un discours radical «pointu» (anticapitaliste, féministe et écosocialiste); en défendant ouvertement des revendications transitoires (nationalisation des banques et de l'énergie sous contrôle des travailleurs, interdiction des licenciements...) et que nous n'avons cédé à aucune forme d'électoralisme ou de populisme.

On doit noter que pour toute la gauche radicale prise ensemble, si progression il y a, on ne peut nullement parler de «percée» avec 51.595 voix, soit 2,1%. A titre de comparaison, si aux élections européennes de 2004 le total des deux listes la gauche radicale qui s'y présentaient était de 25.320 voix (1,1%), aux élections législatives de 2007 les 4 listes présentes à ce scrutin ont totalisé 47.948 voix, soit 1,9%. La progression est donc minime.

Pour ces européennes, c'est évidement au «microscope» qu'il faut analyser en détail nos résultats chiffrés. Mais l'exercice n'est pas inutile au regard des rapports de forces avec les autres organisations de la gauche radicale et comme baromètre de notre implantation. Ainsi, c'est dans la Région bruxelloise que notre score est le plus important, puisque la liste LCR-PSL y fait 0,62% (2.513 votes), soit le double en pourcentage de notre résultat pour l'ensemble du collège électoral francophone. Ce score est également supérieur à celui de la liste unitaire régionale bruxelloise PC-PSL-LCR-PH (0,50%), ce qui confirme la pression un peu moindre du «vote utile» aux élections européennes.

C'est également à Bruxelles que les écarts avec les résultats des autres organisations de la gauche radicale sont les plus notables. Notre score représente ainsi quasiment le double de celui réalisé par la liste PC-GE (0,33%). Dans le canton de Saint-Gilles, traditionnellement très à gauche nous réalisons notre meilleur score en Belgique francophone avec 1,4% de voix (contre 1,5% pour le PTB, 0,7% pour le PC et 0,4% pour CAP) L'ensemble de la gauche radicale dépasse ainsi dans ce canton les 4%! De tels scores sont bien entendu le résultat du travail mené par les sections du PSL et de la LCR sur Bruxelles. Malgré l'effort supplémentaire qu'a représenté la participation à la liste régionale, la section de Bruxelles a mené une excellente campagne de terrain.

En Wallonie, c'est dans le Hainaut que nous comptabilisons le plus de votes après Bruxelles avec 2.069 voix, tandis que le pourcentage y est légèrement moindre (0,28%) que la moyenne francophone (0,32%). Dans cette province géographiquement étendue, les résultats reflètent bien également l'implantation militante, qui est plus éclatée. Nos meilleurs scores sont ainsi réalisés à Mons (0,5%) où existe une dynamique section du PSL, ainsi que dans les cantons de Binche (0,5%) et de Frameries (0,4%). Nos camarades de la section de Charleroi-Le Centre ont réalisé eux aussi un énorme travail.

Dans la province de Liège, notre pourcentage est sensiblement équivalent à notre moyenne francophone et nous récoltons 1.732 votes. Là aussi le résultat chiffré est directement lié à notre implantation militante et à la bonne collaboration entre les sections liégeoises de la LCR et du PSL. Le résultat y est à la hauteur du travail accompli avec un score de 677 votes, soit 0,7%, pour le canton de Liège. Partout ailleurs dans la province, nos résultats par cantons sont par contre inférieurs à la moyenne provinciale, sauf à Stavelot (0,31%) et à Verviers (0,32%).

Dans les autres provinces, où nous n'avons pas de section organisée et où un travail de propagande systématique n'a donc pas été possible, les résultats sont bien sûr à l'avenant: Brabant wallon (0,25%); Namur (0,19%) et Luxembourg (0,19%). Quelques efforts menés tant par la LCR que le PSL ou par des sympathisant/es ont toutefois donné quelques petits résultats dans plusieurs cantons. A ce titre, nous voulons grandement remercier toutes les personnes qui nous ont contacté au cours de la campagne pour nous aider à diffuser notre matériel dans leur localité.

Dans la rue comme dans les urnes...

Cette campagne électorale nous a donné l'occasion de faire connaître la LCR et nos propositions parmi des couches très larges et de nous profiler parmi elles comme une organisation clairement anticapitaliste, féministe, écosocialiste et internationaliste. Elle nous a permis de redynamiser notre organisation autour d'une activité commune et de démontrer notre capacité à mener une réelle campagne électorale et à relever ses principaux défis (récolte des signatures de parrainage, élaboration d'un programme solide, d'un matériel élaboré, avec une large diffusion militante, etc). Last but not least, cette campagne se traduit par un renforcement militant de la LCR et par un large «capital sympathie» autour de nous. Tout cela constitue une base qu'il nous faut à présent consolider à l'occasion des échéances qui se profilent dès la rentrée prochaine.

En effet, en Belgique francophone, la formation de gouvernements «olivier» va, dans le contexte de la crise et de l'austérité (qui vont faire très mal dans les mois à venir), mettre encore plus l'accent sur l'absence d'une force d'opposition de gauche conséquente. Avec les Verts au pouvoir, cela ajoute toute l’importance d’une dimension écosocialiste à cette opposition 100% à gauche. Dans ce sens, la LCR poursuivra ses efforts afin de défendre une alternative résolument anticapitaliste, en soutenant et encourageant les luttes et les résistances avec autant de force et de détermination qu'au cours de sa campagne électorale. Nous plaiderons également l'unité d'action de la part de l'ensemble de la gauche radicale face aux plans d'austérité des gouvernements fédéraux et régionaux qui s'annoncent. Dans ce sens, ainsi que pour procéder à un échange de vues sur la situation politique et nos bilans électoraux respectifs, la LCR a décidé de prendre contact avec tous les partis de la gauche radicale.


La campagne en quelques chiffres

La réalisation d'un bon site internet de campagne (agréable à consulter et avec du contenu) et d'une série de vidéos de très bonne qualité nous a considérablement aidé à profiler notre campagne de manière «moderne», sérieuse, et accessible. Depuis son lancement à la fin du mois d'avril jusqu'au 7 juin, le nombre total de visites uniques sur ce site de campagne a été de 9.809, soit une moyenne quotidienne de 226 visites uniques. Une série de 9 vidéos de très bonne qualité ont été réalisées par nos soins et diffusées sur internet et parfois reprises sur des sites d'infos de médias commerciaux. En 5 mois, pas moins de 14 tracts et 3 affiches ont été réalisés au cours de cette campagne pour un tirage total de 75.000 tracts et 6.300 affiches. L'un des objectifs de notre campagne était de pouvoir la réaliser de la manière la plus auto-financée possible. Au total, moins de 7.500 euros ont été dépensés pour notre campagne, la quasi-totalité provenant de dons.


Dans les médias...

Notre liste a bénéficié (avec des temps et un espace très variables bien entendu!) de 8 passages télé; 5 passages radio et a été citée dans une trentaine d'articles de presse et/ou sur internet. Comparativement aux élections précédentes, pour une liste de la «petite gauche», l'écho médiatique a donc été notable, mais il ne représente toujours qu'une infime partie de celui consacré aux partis traditionnels! De plus, cet écho ne fait pas tout: c'est la présence sur le terrain qui compte avant toute chose. On doit cependant souligner la très bonne prestation médiatique de notre camarade et tête de liste Céline Caudron, qui a donné une image déterminée, combative, féministe et jeune à notre campagne. Présentée comme le «nouveau visage de l'extrême gauche», Céline recueille un bon score personnel avec 2.000 voix de préférence. A noter que l'interview vidéo de notre tête de liste au «Talk Elections» du site RTL Info a été vue près de 15.000 fois (3e plus vue sur 100 candidat/es). Ensuite, notre campagne menée de concert avec d'autres partis anticapitalistes européens, dont le plus connu est le NPA, a également été un élément important. Notre camarade Olivier Besancenot, porte-parole du NPA, a soutenu notre campagne par sa présence à notre conférence de presse à Tournai et à travers un message vidéo, ce qui nous a grandement aidé à «forcer» le black-out médiatique. Loin de «fétichiser» l'image de Besancenot ou encore moins d'espérer obtenir une illusoire percée électorale avec elle, il s'agissait d'opérer une identification politique entre le courant et l'orientation qu'il incarne et notre propre campagne. De ce point de vue, le résultat a été largement atteint.


Des encouragements...

Au cours de notre campagne nous avons reçu plusieurs messages de soutien, par mail ou de vive voix lors de nos interventions sur les marchés, dans les manifestations et rassemblements. Beaucoup de personnes ont marqué leur enthousiasme à découvrir l’existence de notre organisation et d’une liste anticapitaliste en Belgique. Les réactions étaient aussi très positives quant aux messages que nous avons véhiculés, avec un profil dynamique et loin des stéréotypes poussiéreux sur la gauche radicale, sans nous perdre dans des débats communautaires et institutionnels imposés par le haut, en proposant des mesures radicales et en insistant sur la nécessité de renforcer les résistances et les luttes sociales pour que cette crise soit payée par les capitalistes et eux seuls. Certain/es nous ont promis leur vote parce que le soi-disant «vote utile» pour les candidat/es les plus à gauche sur les listes PS ou Ecolo ne les convainc plus, parce qu’ils/elles préféraient, cette fois-ci, voter en fonction de leurs convictions, parce que la crise qui n’en est qu’à ses débuts met en lumière toute la pertinence d’alternatives anticapitalistes, … Merci à toutes celles et tous ceux qui nous ont apporté leurs encouragements. Cela nous a fait chaud au cœur et à boosté notre enthousiasme tout au long de cette campagne et conforté notre volonté de continuer, dans les quartiers, dans les entreprises, dans les écoles, à soutenir les résistances et les luttes, à défendre le plus largement possible une alternative résolument anticapitaliste et à poser des jalons pour construire une large force d’opposition 100% à gauche.

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